II. Recrutement aux fins de placement dans le service domestiqueLes filles deviennent travailleuses domestiques de différentes façons. Bien que le but explicite du processus de placement ne soit pas toujours lutilisation de la fille pour les travaux ménagers, en réalité elles finissent presque toujours par faire du travail domestique. Beaucoup de filles employées comme domestiques font lobjet dexploitation par le travail aussi bien que de mauvais traitements et de négligence envers les enfants. Les recruteurs et les employeurs en sont les principaux responsables, mais les parents négligent aussi leur devoir de veiller sur leur enfant et dassurer son bien-être, même à distance. Enfin, le gouvernement ne poursuit pas les crimes contre les enfants et ne garantit pas que leurs droits soient respectés. Recrutement de filles de GuinéeEn Afrique de lOuest, les enfants sont souvent élevés par des parents proches (oncle, tante, grands-parents) ou par des parents éloignés de la famille élargie ; cette tradition est parfois appelée en anglais child fostering, ou en Afrique de lOuest francophone placement ou confiage.38 Si beaucoup de ces placements sont faits auprès de membres de la famille, les parents envoient aussi leurs enfants vivre avec des personnes qui ne sont pas de la famille, comme des amis, des parrains, des connaissances, ou même de complets étrangers. Sur les 32 filles guinéennes interrogées, 17 ont indiqué quelles avaient été envoyées à leurs oncles ou tantes directs. Lune avait été envoyée à une cousine ; pour les 14 autres, les familles daccueil nétaient pas des parents. Motifs des parentsFréquemment, les parents envoient leurs enfants vivre avec des membres de la famille lorsque ceux-ci vivent dans une ville plus importante. Les parents des zones rurales pensent souvent que la vie en ville est plus facile, et quelle offre plus de possibilités même si leurs parents en ville sont pauvres. En particulier, les parents espèrent souvent que leurs enfants auront une éducation ou une formation professionnelle en ville et quainsi ils auront plus tard un bon travail.39 A vrai dire, les niveaux généraux de santé, de nutrition et déducation sont beaucoup plus bas dans les zones rurales que dans les zones urbaines.40 Beaucoup de familles ont un grand nombre denfants et jugent impossible de les nourrir tous convenablement ; ce problème est accentué par la polygamie et un accès limité à la planification familiale, ce qui signifie quun homme a plusieurs femmes et encore plus denfants, aux besoins desquels il doit subvenir. Un père a expliqué :
Mais la pauvreté et le sous-développement ne sont pas les seuls facteurs en jeu. Il y a aussi de forts préjugés contre léducation et lindépendance des filles dans les zones rurales, qui servent à « diriger » les filles sur la voie du travail domestique. On attend des filles quelles fassent des travaux domestiques et puis quelles se marient jeunes. Envoyer les filles ailleurs pour faire du travail domestique devient un des quelques « débouchés » accessibles.42 Les parents « offrent » parfois leur enfant à titre daide dans la maison de quelquun de la famille, ou quand on le leur demande. Par exemple, ils peuvent le faire quand dautres membres de la parenté nont pas denfant, presque comme une façon « dajuster le déséquilibre démographique ».43 Plus particulièrement, les parents envoient les filles pour faire du travail domestique quand le membre de la famille daccueil na lui-même pas de fille, comme lillustre le cas de Mahawa B., de Forécariah, âgée de huit ans, qui a été envoyée au village de son oncle et de sa tante, dans la même préfecture. Elle nous a dit : « Mon oncle a demandé à ma mère denvoyer une fille. Il na pas de fille. Mon père a beaucoup denfants. »44 Mahawa a alors été envoyée à son oncle pour faire des travaux domestiques et du travail agricole dans la plantation de la famille. Autant ses parents que son oncle et sa tante considéraient quil est normal que ce type de travail soit fait par une fille : ses trois frères allaient à lécole ; elle et ses surs ny allaient pas. En envoyant Mahawa à son oncle et sa tante, ses parents privilégiaient son travail plutôt que son éducation, chose qui arrive souvent en Guinée pour les filles. La famille demande aussi fréquemment à ce quune fille lui soit envoyée à la naissance dun bébé, pour quelle aide à soccuper de lenfant. A lâge de cinq ou six ans, Dora T. a quitté Norassaba en Haute Guinée pour Conakry, une distance de 500 kilomètres :
Dans dautres cas encore, les parents envoient leurs enfants chez dautres membres de la famille parce quil y a une crise dans la famille, par exemple un divorce ou une maladie.46 Quand les parents divorcent, soit les enfants restent avec leur mère, soit leur père les envoie chez une femme de la famille, sa sur en général.47 Dans ce cas, ces familles sont considérées comme rendant un service aux parents, et comme « apportant de laide » en prenant un enfant. Les enfants sont aussi envoyés vivre dans dautres familles en cas de divorce. Cest ce qui est arrivé à Justine K., qui a été envoyée chez sa tante :
Après avoir été abandonnée par son mari, Aminata Y. du village de Madina dans la préfecture de Forécariah, a envoyé sa fille Rosalie, âgée de cinq ans, vivre chez une amie de la famille. Elle a sept enfants et sest trouvée incapable de soccuper de tous. Lamie qui vivait près de chez elle avait proposé de laider. Toutefois, elle a fait travailler Rosalie si dur que quatre ans plus tard, sa mère la reprise. Elle a expliqué : « Mon amie était méchante avec la fille. »49 La maladie dun parent est encore un autre facteur qui conduit à mettre un enfant en famille daccueil. Quand les parents tombent gravement malades et réalisent quils peuvent mourir, ils envoient souvent leurs enfants vivre chez dautres membres de la famille. Il y a environ 370 000 orphelins en Guinée, soit environ 8 pour cent de tous les enfants. Parmi ces enfants, il y a environ 28 000 orphelins du SIDA.50 Ce grand nombre dorphelins représente un défi pour les systèmes traditionnels de mise en famille daccueil, car les familles peuvent se retrouver avec plus denfants quelles ne peuvent en élever. Sur les 32 filles guinéennes interrogées par Human Rights Watch pour ce rapport, quatre étaient orphelines et neuf avaient perdu un parent.51 Deux autres avaient une mère souffrant de maladie chronique. Fanta T., âgée de quatorze ans, fait partie des orphelines que nous avons interrogées ; elle nous a dit :
La mère de Brigitte M. est morte quand des groupes armés de Sierra Leone ont attaqué la ville frontalière de Pamelap. Brigitte a vécu avec son père, qui a sombré dans la misère tandis que ses autres enfants partaient, et quun fils est mort. Elle a raconté comment son père avait décidé de la confier à une totale étrangère :
Comme lindique ce cas, parfois les filles ont été envoyées vivre avec des personnes inconnues des parents ; dans dautres cas, les filles ont été envoyées chez des amis de la famille ou chez des patrons puissants.54 A lâge de 13 ans, Angélique S. a été envoyée par sa famille vivre chez leurs patrons, dans une relation qui rappelle lépoque féodale : ses parents, ainsi que des frères et surs plus âgés, sont ouvriers agricoles sur une parcelle de terrain ; les propriétaires ne leur versent pas de salaire mais leur permettent dy vivre et de garder pour leur propre consommation assez de riz et du sel.55 Elle nous a raconté son expérience et celle de sa sur, qui ont été toutes deux obligées de faire des travaux domestiques sans être payées :
Daprès son frère, la famille était contente denvoyer Angélique à Conakry, parce quil « ny a pas de choix ici pour elle, ici il ny a rien, ni école ni travail tout ce quelle peut faire ici cest trouver un mari ».57 Il a aussi expliqué que la femme du patron a donné son nom à Angélique, ce qui revient pour lui à être sa marraine. Daprès le frère : « Nous savions quun jour ils lemmèneraient [Angélique] à Conakry. » Alors quils avaient promis quils enverraient la jeune fille à lécole, cela ne sest pas produit. Motifs des fillesLa plupart des filles sont envoyées dans des familles daccueil à un si jeune âge quelles nexpriment aucun désir ni ne font elles-mêmes le choix de sen aller. On peut plutôt supposer que beaucoup de ces jeunes enfants souffrent dêtre tout à coup séparés de leurs parents et autres membres proches de leur famille. Toutefois, certaines des filles interrogées par Human Rights Watch ont dit quelles étaient impatientes daller chercher de telles opportunités de travail. Elles ont souvent limpression quelles doivent le faire pour contribuer aux faibles revenus de leur famille. Par exemple, Thérèse I. a quitté sa famille à lâge de 12 ans à Boké pour gagner de largent à Conakry :
Certaines adolescentes cherchent aussi une place de travailleuse domestique de leur propre volonté. Francine B. de Conakry a décidé à lâge de 16 ans de chercher du travail parce quelle était orpheline et quelle navait quune aide limitée chez sa sur, où elle vivait. Par une connaissance de son frère, elle a trouvé un couple libano guinéen qui la employée comme nounou.59 Ceci est un exemple du désir des enfants et des adolescents de contribuer à léconomie familiale ou dêtre indépendants. Méthodes de recrutementQuand les parents ont envoyé leur fille pour quelle demeure chez un membre de la famille, le contact sest fait facilement. Quand des filles nont pas été placées chez des membres directs de la parenté, le contact avec la famille daccueil sest fait souvent par le biais de relations dans le village ou les environs. Par exemple, les parents ont parfois placé des filles chez des voisins ou des gens vivant à proximité. Quand la famille daccueil a déménagé, la fille est partie avec elle. Les parents ont aussi fréquemment envoyé leurs filles vivre dans des familles appartenant au même groupe ethnique ou au même village, et avec qui ils se sentaient reliés, même sil ny avait pas de lien familial ou de contact antérieur. Sylvie S., treize ans, de la préfecture de Kindia, a expliqué comment cela sétait passé pour elle :
Dautres filles ont été recrutées par des femmes qui sont venues dans leurs villages et ont négocié le placement de la fille et les conditions avec ses parents. Dans certains cas, les filles ont ensuite travaillé pour ces femmes. Dans dautres cas, les femmes ont agi en tant quintermédiaires pour quelquun de la famille ou par une amie qui cherchait un enfant travailleur domestique ; Georgette M., de Lola dans la Région forestière de Guinée, se souvient :
A Conakry, plusieurs femmes jouent le rôle de intermédiaires : elles placent des filles de leur région dorigine dans des familles de la capitale. Des filles peuvent arriver à Conakry et aller trouver une de ces femmes de leur propre initiative et rester chez elle jusquà ce quelles trouvent une place.62 Une représentante du ministère des Affaires sociales a observé :
En Haute et Moyenne Guinée, des ONG locales ont aussi signalé la présence dintermédiaires qui envoient un grand nombre denfants vers le travail domestique.64 Les tutricesLes employeurs sont surtout des femmes des classes moyennes urbaines. Elles ont tendance à demander une fille à leurs parents plus pauvres qui vivent à la campagne, ou à envoyer des personnes intermédiaires pour trouver une fille dans leur village dorigine ou à Conakry. 65 De façon ironique, des niveaux plus élevés déducation et demploi chez les femmes citadines africaines de la classe moyenne en Guinée, et dans dautres parties de lAfrique de lOuest, ont entraîné une plus forte demande de travailleurs domestiques.66 De nos jours, beaucoup de femmes africaines vivant en ville ont un travail et elles veulent avoir à la maison de laide bon marché pour soccuper de leurs enfants et du foyer ; aussi, au lieu demployeur des adultes qui vont plus probablement demander un salaire, elles utilisent des filles domestiques. Toutefois, certaines familles daccueil sont également pauvres et vivent dans des zones rurales, en particulier lorsque larrangement se passe au sein de la famille. Recrutement de filles du MaliDans toute lAfrique de lOuest, les filles ont de plus en plus essayé de quitter leurs villages pour chercher du travail ailleurs. Des adolescentes du Mali vont parfois chercher du travail dans les pays voisins, comme la Guinée, la Côte dIvoire, et le Sénégal. Au Mali et dans dautres pays du Sahel, les régions côtières sont considérées comme plus riches et sont donc devenues des destinations populaires. Les filles migrantes travaillent en général pour des employeurs avec qui elles nont pas de lien de parenté. Lémigration a donné à ces filles la possibilité dexpérimenter la vie urbaine, dapprendre de nouvelles langues, et daccumuler des biens propres. Les filles en particulier ont souvent voyagé pour accumuler des biens pour leur dot.67 Ce type de migration des adolescents est en général davantage décidé par lenfant lui-même que le confiage, même si certains parents peuvent donner leur consentement au départ de leur enfant, ou même simpliquer dans le processus dorganisation du voyage et du travail. Par exemple, beaucoup denfants et de jeunes adultes migrent depuis le Burkina Faso, le Mali, et dautres pays de la région pour travailler dans les plantations de cacao de Côte dIvoire, même si la guerre et le climat de xénophobie contre les gens du nord ont réduit le flux migratoire.68
Motifs des fillesLes filles maliennes migrent souvent à la capitale, Bamako, mais aussi vers des pays voisins comme la Guinée pour constituer leur trousseau de mariage. La dot consiste souvent en ustensiles de cuisine, vêtements et bijoux, et elle est donnée au moment des fiançailles à la famille du futur mari. Ce nest pas un phénomène nouveau, mais le nombre de filles migrantes semble avoir augmenté, et les filles migrent plus loin maintenant. Des études faites au Mali et au Burkina Faso ont montré que la pression de lentourage pour rassembler des articles originaux et précieux pour la dot a augmenté énormément dans toute la région. 69 Comme des filles sont allées loin et sont revenues avec de nouveaux articles pour leur dot, dautres ont ressenti le besoin den faire autant. Après une période de travail, elles reviennent et se marient.70 Toutefois, toutes les filles ne partent pas pour constituer leurs dots. Certaines filles partent simplement parce quelles souhaitent être indépendantes, et elles veulent obtenir des biens matériels, par exemple des vêtements et des bicyclettes. Dautres peuvent partir pour la dot, mais finissent par rejeter le mari qui leur est proposé, et cherchent davantage dindépendance. Cest ce qui est arrivé à Carine T. quand elle a quitté Bamako :
Plusieurs autres filles sont dabord allées à Bamako pour faire du travail domestique, et ont rencontré ensuite des femmes qui leur ont dit quelles pouvaient gagner plus dargent à Conakry. Florienne C., dix-sept ans, a raconté son expérience :
Les enfants travailleurs domestiques maliens à Conakry sont venus de différentes régions, mais au cours des dernières années, un grand nombre de filles est arrivé de la région de Sikasso dans le sud du Mali, en particulier de Selingué.73 Le départ de nombreuses filles de Selingué sexplique en partie par sa proximité avec la frontière entre la Guinée et le Mali. Mais il peut aussi sexpliquer par la pression et linfluence de lentourage : comme plus de filles quittent le village et reviennent plus tard avec de largent, les prix des dots montent, et dautres filles sont motivées pour partir.74 Méthodes de recrutementDaprès les entretiens de Human Rights Watch avec les victimes, les filles maliennes sont souvent recrutées par des femmes guinéennes ou maliennes à Bamako, qui les persuadent que si elles travaillent à Conakry, elles gagneront davantage et mèneront une vie meilleure quau Mali. Les actions de certaines de ces femmes peuvent sapparenter à la traite, quand elles font de fausses promesses, placent sciemment une fille chez des employeurs qui les exploitent et les maltraitent, et gardent pour elles une partie de largent des filles. Daprès des membres de la communauté malienne, les filles sont fréquemment recrutées dans les quartiers de Oulofoulogou et de Médina Corah à Bamako. Plusieurs de ces femmes maliennes et guinéennes sont bien connues dans la communauté pour leur rôle dintermédiaires entre les filles maliennes et les tutricesguinéennes.75 Les filles sont fréquemment envoyées en groupes à Conakry. Daprès Carine T. :
Deux filles, Vivienne T. et Mariame C., nous ont dit quelles avaient été approchées par une femme qui a éveillé leur intérêt en disant quelles pourraient gagner beaucoup dargent à Conakry. Elle a envoyé fréquemment des filles de Bamako en Guinée, et a travaillé avec un chauffeur qui y transportait les filles. Vivienne avait 16 ans et Mariame 14 quand elles ont été recrutées par cette femme à Bamako.77 Une liste78 de sept travailleuses domestiques maliennes à Conakry qui sont arrivées entre septembre 2002 et novembre 2003 ont identifié deux femmes intermédiaires qui avaient envoyé ces filles. Daprès un membre de la communauté malienne, ces femmes étaient bien connues pour leurs activités.79 Toutefois, ces dernières années, certaines intermédiaires semblent soit avoir réduit leurs activités, soit les mener clandestinement. Elles ont tendance à opérer depuis la Guinée plutôt que du Mali, apparemment parce que le gouvernement malien surveille de près leurs activités. Une femme aurait réduit son travail à la suite de pressions de la communauté malienne en Guinée ; une autre serait passée à la clandestinité.80 Les tutricesLa plupart des familles qui emploient des filles maliennes sont basées à Conakry, et appartiennent aux classes moyennes urbaines. Notre enquête a trouvé des cas de filles maliennes travaillant pour un juge,81 un officier des douanes, un pharmacien, un chauffeur de taxi et un homme daffaires.82 Daprès un Malien vivant à Conakry, les filles maliennes sont considérées comme plus sérieuses et « contrôlables » que les enfants travailleurs domestiques guinéens.83 Recrutement denfants réfugiés de la régionEn plus des types de migration mentionnés ci-dessus, de nombreux enfants ont franchi les frontières pour échapper aux violences ou à la guerre. A cause des conflits armés dans les pays voisins du Liberia et de Sierra Leone, la Guinée a accueilli en son sein des centaines de milliers de réfugiés au cours des dix dernières années. Au plus fort de la crise, plus dun demi million de réfugiés vivaient à lintérieur de ses frontières.84 Quand la situation dans ces pays sest stabilisée, la plupart des réfugiés sont repartis ; mais dautres, dont ceux qui sont venus étant enfants, sont restés et ont trouvé du travail en Guinée. Au cours des années récentes, les réfugiés de Côte dIvoire ont aussi cherché protection en Guinée. Actuellement, il y a environ 30 000 réfugiés en Guinée, daprès le Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés (UNHCR).85 Les enfants réfugiés se trouvent dans une situation vulnérable, en particulier quand ils sont séparés de leurs parents. Beaucoup denfants réfugiés sont devenus des victimes de lexploitation au travail, entre autres comme travailleurs domestiques.86 Par exemple, Julie M. de Sierra Leone a été envoyée par sa mère à Conakry quand elle avait environ sept ans, pour quelle échappe aux conséquences du conflit armé dans son pays natal. Sa mère la placée chez une connaissance, où la fillette a travaillé comme domestique.87 Jacqueline C., huit ans, est de Côte dIvoire et a fui la guerre avec sa mère et ses frères et soeurs. Elle a été recueillie par une femme guinéenne bien intentionnée qui a expliqué quelle avait, ainsi que dautres personnes, pris chez elle des membres de la famille réfugiée. Si Jacqueline C. va à lécole, elle passe aussi la plupart de son temps à effectuer des travaux domestiques.88 Risques liés au voyageLes filles guinéennes et maliennes courent des risques quand elles voyagent pour chercher du travail. Elles voyagent souvent avec des personnes quelles ne connaissent pas très bien, mais dont elles sont dépendantes pendant la durée du voyage. Quand Marianne N., 16 ans, a quitté Conakry pour Monrovia en autobus, elle était censée rencontrer le frère de sa voisine, qui devait laider à trouver du travail. Mais il nest pas venu et elle était coincée :
Susanne K. est partie toute seule à Conakry après la mort de ses parents. Elle sest retrouvée dans une position également vulnérable :
Les accidents de la circulation sont un sérieux problème en Afrique de lOuest, en particulier pour les personnes pauvres qui voyagent avec des moyens de transport bon marché. La mort en 2003 de deux filles maliennes en route pour Conakry pour y être employées comme domestiques a dramatiquement souligné ce problème. Sata Camara, 15 ans, et Fati Camara, 14 ans, (leurs vrais noms), sont mortes sur le coup. Cinq autres filles entre 12 et 18 ans qui se trouvaient aussi dans le véhicule ont été blessées.91 Après cet accident, la communauté malienne en Guinée sest mobilisée contre la traite et lexploitation des enfants. La plupart des filles du Mali franchissent la frontière sans avoir de papiers didentité corrects. Elles comptent sur les intermédiaires pour soccuper de la paperasserie à leur place et deviennent ainsi dépendantes delles. Les intermédiaires offrent parfois un pot-de-vin aux agents à la frontière en labsence de papiers corrects pour des enfants, cela veut dire une carte didentité et aussi une autorisation parentale de voyager.92 38 Esther Goody, Parenthood and Social Reproduction: Fostering and Occupational Roles in West Africa. (Cambridge: Cambridge University Press, 1982); Fafo Institute of International Studies, Travel to Uncertainty; Enda Jeunesse, Migrations, confiage et trafic d'enfants en Afrique de l'Ouest, Dakar 2000, http://eja.enda.sn/docs/jeuda_106.doc (consulté le 15 mars 2007); UNESCO, Confiage scolaire en Afrique de lOuest. 39 Fafo, Travel to Uncertainty, p.15-18. 40 Selon lUNICEF, 35 pour cent de la population rurale utilise des sources deau potable de bonne qualité, contre 78 pour cent dans les zones urbaines. Pour consulter ces données, entre autres, voir UNICEF, At a glance: Guinea, http://www.unicef.org/infobycountry/Guinea_statistics.html (consulté le 15 mars 2007). 41 Entretien de Human Rights Watch avec le père de la fille employée domestique, Forécariah, 7 février 2007. 42 Mike Dottridge, Trafficking in children in West and Central Africa, in: Gender and Development, vol. 10, no.1, mars 2002, p.38-42; Annababette Wils, Yijie Zhao et Ash Hartwell, Looking Below the Surface. Reaching the Out-Of-School Children, CWP-02-01,2006, http://www.epdc.org/static/LookingBelowTheSurface.pdf (consulté le 28 mars 2007). 43 Fafo Institute of International Studies, Travel to Uncertainty, p. 9; Suzanne Lallemand, La circulation des enfants en société traditionnelle. Prêt, don, échange. (Paris: LHarmattan 1993). 44 Entretien de Human Rights Watch avec Mahawa B., 8 ans, Forécariah, 7 février 2007. 45 Entretien de Human Rights Watch avec Dora T., 14 ans, Conakry, 5 février 2007. 46 Fafo Institute of International Studies, Travel to Uncertainty, p. 37. 47 ONG ACEEF, Etude sur le trafic et le travail domestique des enfants en Guinée, Rapport provisoire (novembre 2005), p. 17-18, http://www.crin.org/resources/infoDetail.asp?ID=6700&flag=report (consulté le 14 avril 2007). 48 Entretien de Human Rights Watch avec Justine K., 18 ans, Conakry, 6 décembre 2006. 49 Entretiens de Human Rights Watch avec Aminata Y. et sa fille Rosalie Y., 9 ans, Forécariah, 7 février 2007. 50 UNICEF, At a glance: Guinea, http://www.unicef.org/infobycountry/Guinea_statistics.html (consulté le 15 mars 2007). 51 Les chiffres sont peut-être plus élevés puisque certains enfants ont perdu contact avec leurs parents. 52 Entretien de Human Rights Watch avec Fanta T., 14 ans, Conakry, 8 décembre 2006. 53 Entretien de Human Rights Watch avec Brigitte M., 15 ans, Conakry, 6 décembre 2006. 54 Entretien de Human Rights Watch avec Laure F, 18 ans, Conakry, 8 décembre 2006. 55 Entretien de Human Rights Watch avec le frère dAngélique S., Fokoufokou près de Forécariah, 7 février 2007. 56 Entretien de Human Rights Watch avec Angélique S., 15 ans, Conakry, 7 décembre 2006. 57 Entretien de Human Rights Watch avec le frère d Angélique S., Fokoufokou près de Forécariah, 7 février 2007. 58 Entretien de Human Rights Watch avec Thérèse I., 14 ans, Conakry, 8 décembre 2006. 59 Entretien de Human Rights Watch avec Francine B., 18 ans, Conakry, 7 décembre 2006. 60 Entretien de Human Rights Watch avec Sylvie S., 13 ans, Conakry, 7 décembre 2006. 61 Entretien de Human Rights Watch avec Georgette M., 16 ans, Conakry, 7 décembre 2006. 62 Entretien de Human Rights Watch avec Ramatoulaye Camara, Directrice de lUnité Enfance en danger, ministère des Affaire sociales, Conakry, 7 décembre 2006. 63 Entretien de Human Rights Watch avec Ramatoulaye Camara, Directrice de lUnité Enfance en danger, Conakry, 7 décembre 2006. 64 Entretien de Human Rights Watch avec Nanfadima Magassouba, directrice de la Coalition nationale de Guinée pour les droits et la citoyenneté des femmes (CONAG), et un membre de lorganisation, Conakry, 9 février 2007; communication par courrier électronique de Sabou Guinée, 13 avril 2007. 65 Entretien de Human Rights Watch avec Ramatoulaye Camara, Directrice de lUnité Enfance en danger, ministère des Affaire sociales, 7 décembre 2006. 66 Dottridge, Trafficking in children in West and Central Africa, p.39. 67 Castle and Diarra, The International Migration of Young Malians, p.22-45, p.154-164. 68 Nagel, Kinderhandel in Westafrika; Anti-Slavery International, The Cocoa Industry in West Africa. A history of exploitation(Londres : Anti-Slavery International 2004), http://www.antislavery.org/homepage/resources/cocoa%20report%202004.pdf (consulté le 20 avril 2007). En Côte dIvoire, les gens originaires du nord du pays, et des états voisins du nord, sont souvent accusés de soutenir les rebelles dans le nord. Voir Human Rights Watch, Parce quils ont les fusils il ne me reste rien. Le prix de limpunité persistante en Côte dIvoire, vol. 18, no. 4(A), mai 2006, http://hrw.org/reports/2006/cotedivoire0506/cotedivoire0506web.pdf (consulté le 1er mai 2007). 69 Castle and Diarra, The International Migration of Young Malians, p.22-24; Terre des Hommes, Les filles domestiques au Burkina Faso: traite ou migration? Analyse de la migration laborieuse des enfants de la province du Sourou au Burkina Faso, 2003, p. 12. 70 Entretien de Human Rights Watch avec Berdougou Moussa Koné, Consul à lambassade malienne en Guinée, Conakry, 5 février 2007; Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007. 71 Entretien de Human Rights Watch avec Carine T., 22 ans, Conakry, 8 février 2007. 72 Entretien de Human Rights Watch avec Florienne C., 17 ans, Conakry, 8 février 2007. 73 Entretien de Human Rights Watch avec Berdougou Moussa Koné, Consul à lambassade malienne en Guinée, Conakry, 5 février 2007; Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007. 74 Un phénomène similaire sest produit au Burkina Faso, où dans certains villages la plupart des filles sont parties. Voir Terre des Hommes, Les filles domestiques au Burkina Faso. 75 Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007; Entretien de Human Rights Watch avec une femme membre du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 8 décembre 2007. 76 Entretien de Human Rights Watch avec Carine T., 22 ans, Conakry, 8 février 2007. 77 Entretiens de Human Rights Watch avec Vivienne T., 17 ans, et Mariame C., 15 ans, Conakry, 8 février 2007. 78 Liste de sept cas de filles maliennes employées comme domestiques à Conakry, septembre 2002 novembre 2003, archivée par Human Rights Watch. 79 Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007. Létude commandée par le gouvernement sur le trafic a aussi identifié une fille qui avait rencontré une femme à la gare dautobus de Bamako, et qui la emmenée ainsi que deux autres filles à Siguiri puis à Conakry, pour les placer dans le service domestique et dans des restaurants. Stat View International, Enquête nationale sur le trafic des enfants en Guinée, p.16. 80 Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007; Entretien de Human Rights Watch avec Carine T., 22 ans, Conakry, 8 février 2007. 81 Entretien de Human Rights Watch avec une expatriée vivant à Conakry, 5 décembre 2006. 82 Entretiens de Human Rights Watch avec des filles maliennes, Conakry, 8 février 2007. 83 Entretien de Human Rights Watch avec le vice-président du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 6 février 2007. 84 Human Rights Watch, Forgotten Children of War: Sierra Leonean Refugee Children in Guinea, vol. 11, no.5 (A), Juillet 1999, http://www.hrw.org/reports/1999/Guinée/, p.14-15, (consulté le 7 mai 2007). 85 UNHCR, Guinea: Second repatriation convoy this week to Liberia, 23 février 2007, http://www.reliefweb.int/rw/RWB.NSF/db900SID/JBRN-6YPKF6?OpenDocument&rc=1&cc=gin (consulté le 19 mars 2007). 86 Human Rights Watch, Forgotten Children of War. Sierra Leonean Refugee Children in Guinea, p.26-31. 87 Entretien de Human Rights Watch avec Julie M., 13 ans, Conakry, 8 février 2007. 88 Entretien de Human Rights Watch avec Jacqueline C., 8 ans, Forécariah, 7 février 2007; et avec la tutrice de Jacqueline C., Forécariah, 7 février 2007. 89 Entretien de Human Rights Watch avec Marianne N., 16 ans, Conakry, 6 décembre 2006. 90 Entretien de Human Rights Watch avec Susanne K., 16 ans, Conakry, 6 décembre 2006. 91 Le voyage fatal, Le Lynx, Conakry, No. 612, 15 décembre 2003; Entretien de Human Rights Watch avec une femme membre du Haut Conseil des Maliens, Conakry, 8 décembre 2007. 92 Entretien de Human Rights Watch avec Michèle T., 20 ans, Conakry, 8 février 2007; Stat View International, Enquête nationale sur le trafic des enfants en Guinée, p. 18-19. |