Human Rights Watch

Les Commissions gouvernementales des droits de l'homme en Afrique : Protecteurs ou Pretendus Protecteurs?
Recommandations








Présentation Générale

Résumé

Normes Iinternationales: les Principes de Paris

Facteurs Importants

Etat des Lieux

Contributions Innovatrices et Positives des Commissions

Les Iniatives Régionales

Le Role de la Communauté Internationale

Conclusion

Recommandations

Abréviations

Remerciements




    Recommandations

    Aux gouvernements d'Afrique

· Les gouvernements des pays où des commissions nationales des droits de l'homme doivent encore être créées devraient, en priorité, passer en revue le champ d'action et les limitations des mécanismes de protection et de promotion des droits de l'homme existant déjà dans leur pays, afin de déterminer s'il faut des institutions supplémentaires pour atteindre ce but et, si c'est le cas, voir si ces institutions doivent prendre la forme d'une commission nationale des droits de l'homme ou d'un autre organe. Le débat sur le besoin de créer ou non une commission des droits de l'homme devrait être un large débat basé sur la concertation et la participation de la communauté non gouvernementale locale des droits de l'homme, laquelle est souvent bien placée pour identifier les types de violations et les possibilités de mieux protéger les droits de l'homme tout en étant une source utile d'informations à propos de personnes compétentes qui pourraient occuper le poste de commissaire national aux droits de l'homme.

· Au moment d'établir une commission des droits de l'homme ou de réviser les termes du mandat et autres dispositions relatives à une commission nationale des droits de l'homme existante, les gouvernements devraient veiller à ce que le rôle de la commission soit de rationaliser et de faciliter la procédure générale de dénonciation et de traitement des violations des droits de l'homme. Il faudrait que cela se fasse conformément aux Principes de l'ONU relatifs au Statut des Institutions Nationales (Principes de Paris) qui recommandent, entre autres, un large mandat, un texte de base constitutionnel ou législatif, une procédure de nomination indépendante, et des arrangements financiers qui prévoient des moyens suffisants pour que la commission soit en mesure de remplir son mandat librement et sans ingérence du pouvoir exécutif.

· Accorder à la commission, conformément à la loi, le pouvoir de prendre des décisions, d'enquêter et de faire appliquer la loi, notamment le pouvoir de mener des investigations en toute indépendance, d'avoir librement accès aux témoins, aux documents ou lieux, de demander la coopération d'autres agences gouvernementales, de se fixer des priorités sans aucune restriction de la part d'autres agences gouvernementales, et de confier aux autorités compétentes la poursuite au pénal des auteurs de violations des droits de l'homme. La commission devrait être habilitée à protéger les personnes qui apportent des preuves et à obliger les autorités judiciaires à entamer des poursuites pénales, conformément aux procédures internationales relatives au procès équitable, à l'encontre des auteurs d'atteintes aux droits de l'homme identifiés par la commission.

· Passer par une procédure transparente de consultation pour sélectionner un groupe diversifié de commissaires connus pour leur intégrité, leur indépendance et leur expérience. Ce groupe devrait être largement représentatif de l'ensemble de la société, comptant en ses rangs des représentants des minorités ou autres groupes vulnérables, ainsi que des femmes. Les modalités de nomination, de mandat et de révocation devraient être précisées clairement, avec des garanties d'indépendance, notamment le versement de salaires suffisants et adaptés à la fonction afin d'attirer et de pouvoir garder des personnes compétentes et qualifiées. Le personnel de la commission devrait être choisi et nommé par les membres de la commission.

· Veiller à ce que la commission doive informer régulièrement le public à propos de son travail, notamment à propos de ses enquêtes sur les droits de l'homme, de ses résultats et recommandations, et à ce qu'elle puisse librement faire des déclarations publiques et publier des rapports sur toute question choisie par elle et à sa discrétion, sans devoir d'abord clarifier les choses avec l'exécutif ou d'autres autorités locales, régionales ou nationales ou en informer ces organes à l'avance.

· Inclure dans le mandat de la commission la capacité de sensibiliser le public aux droits de l'homme et de déterminer elle-même les moyens appropriés pour ce faire, ainsi que d'établir des relations de coopération avec les secteurs de la société civile, notamment les médias, les associations non gouvernementales des droits de l'homme et autres ONG aux objectifs similaires.

· Priorité doit être donnée à l'octroi des ressources financières et matérielles nécessaires pour permettre à la commission des droits de l'homme d'assumer ses responsabilités de manière effective, libre et indépendante. Il incombe au gouvernement d'apporter une partie substantielle du budget de la commission des droits de l'homme, comparable à ce que les autres institutions gouvernementales peuvent recevoir. Veiller à ce que les procédures d'élaboration et d'approbation du budget de la commission soient exemptes d'une ingérence ou d'un contrôle excessif de l'exécutif, par exemple en prévoyant que le budget de la commission soit approuvé par un vote du parlement ou un autre moyen permettant de garantir l'indépendance de la commission et l'exercice de la responsabilité démocratique.

· Agir promptement pour suivre les conclusions et recommandations faites par la commission des droits de l'homme. Les personnes que la commission juge responsables d'avoir commis, ordonné, encouragé ou autorisé des violations des droits de l'homme devraient automatiquement être poursuivies en justice.

Aux membres des commissions des droits de l'homme

· Chercher en permanence à remplir pleinement et effectivement le mandat de la commission de protéger et promouvoir les droits de l'homme, et le faire librement et de façon impartiale en tous temps.

Les commissaires devraient en tous temps être indépendants et au service de l'intérêt public, et être considérés comme tels, et ils devraient résister et s'élever contre les pressions partisanes ou autres exercées par la branche exécutive ou d'autres services gouvernementaux à l'encontre de la commission ou de ses commissaires individuellement. Chercher activement le soutien et la coopération régionaux et internationaux qui peuvent contribuer à l'indépendance et à l'autonomie de la commission.

· Prendre toutes les mesures possibles pour que soient connus le rôle, la fonction et le travail de la commission nationale des droits de l'homme et pour qu'elle soit accessible à tous les secteurs de la société, en particulier les groupes vulnérables. Créer des procédures accessibles pour pouvoir contacter la commission et informer de façon opportune tous ceux qui présentent des plaintes, que ce soit en leur nom ou au nom d'autres personnes, de l'action menée par la commission en réponse à leur plainte. S'assurer également que les bureaux de la commission soient facilement accessibles au public et autres personnes qui pourraient souhaiter déposer des plaintes, en veillant à ce que ces bureaux soient centraux et desservis par les transports publics et lorsque cela s'avère possible, en ouvrant des bureaux régionaux et locaux.

· _uvrer activement à l'établissement de solides relations de coopération avec les organisations non gouvernementales locales, notamment les associations des droits de l'homme et la presse indépendante du pays. Servir d'interlocuteur entre le gouvernement et les secteurs non gouvernementaux sur les questions des droits de l'homme.

· Rechercher des moyens de maximaliser les ressources dont dispose la commission, tant les capacités financières que pour le travail sur le fond, par exemple en entreprenant des initiatives communes ou en collaborant avec des organisations non gouvernementales locales des droits de l'homme et autres et, s'il y a lieu et si l'indépendance de la commission n'est pas compromise, avec d'autres agences gouvernementales.

· Poursuivre et intensifier les efforts visant à construire un réseau régional puissant de commissions des droits de l'homme afin de renforcer les commissions existantes, d'inciter les commissions faibles ou trop accommodantes à s'engager plus activement dans les activités de protection des droits de l'homme et d'offrir une protection aux commissaires qui risquent de s'exposer aux représailles de leur gouvernement ou d'autres organes pour le travail de protection des droits de l'homme qu'ils effectuent.

A la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples

· Adopter une approche plus nuancée et axée sur la sensibilisation plutôt que de lancer un appel général à tous les gouvernements africains pour qu'ils créent des institutions nationales des droits de l'homme en toutes circonstances. Aider les institutions nationales africaines des droits de l'homme à affirmer leur indépendance et à devenir plus actives et plus crédibles aux yeux de la population de leur pays. Appeler activement les gouvernements africains ayant des commissions faibles ou dociles à s'abstenir de toute ingérence politique et à fournir les moyens nécessaires.

· Adopter une politique et des mesures spécifiques, notamment des mesures pouvant être prises en cas d'extrême urgence pour permettre d'offrir la meilleure protection possible, individuellement, aux commissaires nationaux aux droits de l'homme qui risquent d'être confrontés aux menaces ou aux représailles de leur gouvernement ou d'autres entités ou individus en raison des activités qu'ils mènent en tant que commissaires nationaux aux droits de l'homme ou en faveur de la protection ou promotion des droits de l'homme.

· En permettant aux institutions nationales des droits de l'homme d'obtenir le statut d'observateur, créer les réglementations et les mécanismes de supervision nécessaires pour garantir que les gouvernements ne feront pas mauvais usage de ce statut en s'en servant pour soustraire leurs exactions à toute surveillance ou pour miner la capacité des ONG des droits de l'homme de contribuer au travail de la Commission africaine.

Au Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme

· Adopter une approche plus nuancée et axée sur la sensibilisation, en prodiguant des conseils aux gouvernements à propos de la création de commissions des droits de l'homme. Eviter d'adopter une approche générale préconisant la création de ce type de commission par tous les gouvernements en n'importe quelle circonstance. Examiner de façon plus critique le contexte politique dans lequel une commission est formée, et être prêt, s'il y a lieu, à déconseiller la création de ladite commission lorsque celle-ci semble miner ou faire obstacle au mandat d'autres organes d'Etat travaillant efficacement pour la protection et la promotion des droits de l'homme. Au moment d'évaluer le contexte et les perspectives de la commission proposée, l'avis des associations non gouvernementales des droits de l'homme et d'autres organes similaires devrait être sollicité et pris en compte tout particulièrement.

· Adopter des mesures visant à renforcer et accroître l'efficacité des commissions des droits de l'homme existantes. Continuer à appeler vigoureusement les gouvernements ayant des commissions des droits de l'homme faibles ou dociles à respecter les Principes de Paris, à s'abstenir de toute ingérence et à fournir les ressources nécessaires. Protester, publiquement s'il y a lieu, contre les actions menées par les gouvernements pour chercher à limiter l'autonomie de leurs commissions des droits de l'homme par le biais de pressions politiques ou financières.

· Apporter un soutien plus important aux commissions des droits de l'homme qui effectuent un travail crédible et légitime. Un plus grand soutien financier, logistique et sur le plan de la formation devrait être offert aux commissions des droits de l'homme qui peuvent faire valoir une solide indépendance et toute une série d'activités, ou qui ont clairement la volonté et la capacité d'y parvenir. Les activités des commissions des droits de l'homme devraient faire l'objet d'une évaluation et d'une supervision régulières.

· Chercher à éviter d'accorder une fausse légitimité aux commissions nationales des droits de l'homme qui, dans la pratique, manquent d'indépendance, sont faibles ou dociles, ou ne font qu'excuser les exactions de leurs gouvernements. Dans ces cas, être davantage prêt à critiquer, publiquement s'il y a lieu, l'action ou l'inertie des commissions des droits de l'homme dociles ainsi que les gouvernements à qui elles doivent rendre des comptes, et leur rappeler que le rôle d'une telle commission est de protéger et de promouvoir les droits de l'homme équitablement et de façon impartiale en tous temps.

· Veiller à ce que tout soutien international aux commissions nationales des droits de l'homme soit octroyé dans le cadre d'un système intégré de soutien à un pouvoir judiciaire indépendant et à des associations de droits de l'homme indépendantes. La capacité d'une commission nationale des droits de l'homme à fonctionner de manière effective est plus grande s'il existe des pouvoirs judiciaire et législatif indépendants ainsi qu'une société civile qui peut faire entendre sa voix.

· Continuer à apporter un soutien à une plus grande interaction régionale entre commissions des droits de l'homme là où elle est susceptible de renforcer les commissions existantes. Fournir un financement et un soutien plus importants pour une plus grande présence des associations locales des droits de l'homme lors des rencontres régionales ou autres sur les commissions nationales des droits de l'homme.

· Créer un système mieux coordonné et plus automatique entre les divers bureaux du Haut Commissariat aux Droits de l'Homme de façon à ce que le conseiller spécial sur les institutions nationales des droits de l'homme et les responsables géographiques travaillent en collaboration plus étroite lorsqu'il s'agit d'apporter des avis techniques.

· Assurer une coopération plus étroite avec les autres agences de l'ONU qui ont une interaction avec les commissions des droits de l'homme - telles que le PNUD ou les opérations de maintien de la paix, les opérations politiques ou dans le domaine des droits de l'homme menées sur le terrain par l'ONU - afin de veiller à ce que le soutien financier et autre de l'ONU aux commissions nationales des droits de l'homme soit coordonné, cohérent et constructif.

Aux bailleurs de fonds internationaux et au Programme des Nations Unies pour le Développement

· Subordonner le soutien financier octroyé aux commissions des droits de l'homme à leurs activités de promotion et de protection des droits de l'homme. Il faudrait augmenter le financement, la formation et le soutien logistique apportés aux commissions des droits de l'homme qui peuvent faire valoir une réelle indépendance et de bons résultats, ou qui ont clairement la volonté et la capacité d'y parvenir. Les financeurs devraient évaluer et superviser les activités des commissions des droits de l'homme de façon régulière.

· Suspendre le soutien financier destiné aux commissions des droits de l'homme dociles qui gardent le silence face aux exactions de leurs gouvernements ou excusent ces exactions.

· Etre prêts à critiquer publiquement les commissions nationales des droits de l'homme qui sont faibles, dociles, manquent d'indépendance ou excusent le gouvernement, ainsi que les mesures adoptées par les gouvernements pour entraver l'autonomie de leur commission des droits de l'homme.

· Lors de l'octroi d'un soutien financier ou autre aux commissions nationales des droits de l'homme, faire bien comprendre aux gouvernements respectifs que c'est à eux qu'il incombe au premier chef de contribuer au fonctionnement de leur commission et qu'ils doivent le faire par des moyens qui n'entament pas l'autonomie de la commission. Les contributions des donateurs internationaux ne devraient pas permettre aux gouvernements d'éluder la responsabilité qui leur incombe de financer suffisamment les commissions nationales des droits de l'homme de leur pays.

· Les financements et autres soutiens apportés aux commissions des droits de l'homme devraient s'accompagner d'un effort semblable pour renforcer l'indépendance du système judiciaire et les associations non gouvernementales locales des droits de l'homme dans le pays. Une commission des droits de l'homme devient souvent plus active et plus efficace lorsqu'il y a interaction avec d'autres agences gouvernementales indépendantes et avec les secteurs de la société civile.

· Accroître le soutien aux formations sur les droits de l'homme organisées pour les commissaires, surtout en Afrique lorsque c'est possible, en utilisant les meilleurs modèles et expériences pratiques, tels ceux offerts par les commissions nationales des droits de l'homme actuelles du Ghana, d'Ouganda et d'Afrique du Sud. Bien qu'il soit bon que les commissaires africains aux droits de l'homme et les membres de leur personnel soient exposés aux expériences d'autres régions du monde et tirent parti de cet apprentissage, les bailleurs de fonds internationaux devraient en priorité faciliter cette formation dans un contexte africain, afin qu'elle soit plus opportune, qu'elle permettre de renforcer les capacités et qu'elle encourage les contacts plus étroits et le partage d'expériences entre commissions nationales africaines des droits de l'homme.

· Apporter un financement et un soutien plus importants pour une plus grande présence des ONG locales des droits de l'homme lors des rencontres régionales ou autres sur les commissions des droits de l'homme en Afrique.

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