Méthodologie et terminologieLes recherches sur le terrain pour ce rapport ont été menées en décembre 2006 et février 2007 à Conakry, capitale de la Guinée, et dans deux autres localités de Basse Guinée, Forécariah et Kilomètre Trente-Six. Les enquêteurs de Human Rights Watch ont organisé la recherche en consultation avec un ensemble dONG nationales oeuvrant dans le domaine du travail et de lexploitation des enfants. Trois associations nous ont aidés à établir le contact avec des filles employées comme domestiques : Action Contre lExploitation des Enfants et des Femmes (ACEEF), lAssociation Guinéenne des Assistantes Sociales, (AGUIAS) et le Haut Conseil des Maliens. De plus, lagence internationale Population Services International (PSI) nous a mis en contact avec des travailleuses du sexe, dont deux avaient travaillé antérieurement comme filles domestiques. Au total, 40 filles travaillant ou ayant travaillé comme domestiques ont été identifiées et interrogées. Nous avons essayé dinterroger des personnes dâges différents, de zones urbaines et rurales, vivant avec des parents ou des étrangers, et ayant actuellement des conditions de vie différentes. Cependant, certaines filles ne connaissaient pas leur âge exact car elles navaient pas de certificat de naissance ; elles ont donné lâge quon leur avait dit quelles avaient, mais il aurait pu être inexact. Aussi, il sest avéré plus difficile de rentrer en contact avec des fillettes, car elles avaient souvent moins doccasions de sortir de la maison et détablir un contact avec le monde extérieur. Trente-trois des personnes interrogées sur les 40 étaient des enfants au moment de lentretien, leur âge allant de 8 à 17 ans.1 Des membres dune ONG locale ont traduit les entretiens du Malinké, du Soussou ou du Peulh en français ; ils ont aussi aidé à réaliser certains des entretiens. De plus, nous avons interrogé quatre parents de filles domestiques, deux tutrices de travailleuses domestiques, un professeur principal adjoint, un médecin, des membres de la communauté malienne en Guinée, des membres dONG nationales et internationales, de lUNICEF, de lOIT et du corps diplomatique en Guinée. Au gouvernement, Human Rights Watch a interrogé la Ministre alors en poste des Affaires sociales, de la Promotion féminine et de lEnfance,2 ainsi que plusieurs fonctionnaires de son ministère, des fonctionnaires du ministère de lEducation, du ministère de la Justice, et un commissaire de police qui soccupe des crimes contre les enfants. Les ONG nationales ont aussi collaboré à lélaboration des recommandations du rapport. Défis méthodologiquesLa recherche portant sur les abus commis contre les enfants, et en particulier les violences sexuelles contre les filles, est un domaine très sensible. Les victimes éprouvent souvent de la honte à propos de ce qui leur est arrivé ou du fait que leur tutrice découvrira leur témoignage. De plus, parler de leurs expériences peut à nouveau les traumatiser.3 La durée et le contenu des entretiens ont été adaptés à lâge de la fille. Les entretiens avec des filles de moins de dix ans nont pas duré plus de 15 minutes, tandis que ceux avec des filles plus âgées ont pu prendre jusquà une heure. Quand des filles nécessitaient une assistance immédiate, par exemple du fait dexpériences répétées de viol de la part dun tuteur, les ONG locales ont été informées et ont pu agir. Trente-six entretiens ont été traduits par des personnes connues de la fille interrogée. Nous avons essayé davoir une enquêtrice et une traductrice. Toutefois, cela na pas toujours été possible. Trente et un entretiens ont été réalisés par une chercheuse et neuf par des chercheurs masculins. Sept entretiens ont été réalisés avec des traducteurs masculins. Les entretiens se sont déroulés dans un environnement calme et les noms des personnes interrogées nont pas été dévoilés ; dans ce rapport, tous les noms utilisés pour les enfants travaillant comme domestiques sont des pseudonymes, sauf indication contraire. Etant donné que lenquête a eu lieu pendant une période dagitation politique en Guinée, nous avons dû annuler la visite en Haute Guinée. Cette étude porte donc sur la situation des filles travaillant comme domestiques dans la région côtière, connue sous le nom de Basse Guinée. TerminologieCe rapport utilise les expressions enfant travaillant comme domestique et fille domestique pour désigner les filles qui font lobjet de la recherche. Le terme enfant travailleur domestique est utilisé plus couramment, mais masque le fait que presque tous les enfants travaillant comme domestiques en Guinée sont des filles. En général, nous appelons les personnes qui recrutent des filles pour le service domestique des intermédiaires. Nous nutilisons le terme trafiquant que lorsque nous nous référons à des personnes impliquées dans le crime de la traite. Pour décrire les adultes pour qui la fille travaille, le rapport utilise les termes famille daccueil, tuteur ou tutrice (employés par les travailleurs domestiques eux-mêmes) ou employeur. Ces termes sontassez différents et indiquent les différents rôles et responsabilités de ces adultes. Le choix de ces termes reflète le fait que les adultes qui ont des filles travaillant comme domestiques à leur domicile ont des devoirs légaux, aussi bien comme tuteurs que comme employeurs.4 1 Dans ce rapport, enfant désigne tout personne ayant moins de 18 ans. La Convention de lONU relative aux droits de lenfant déclare : Au sens de la présente Convention, un enfant sentend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt, en vertu de la législation qui lui est applicable. Convention relative aux droits de lenfant, Article 1, adoptée le 30 novembre 1989, G.A. Res. 44/25, annex, 44 U.N. GAOR Supp. (No 49) à 167, U.N. Doc. A/44/49 (1989), entrée en vigueur le 2 septembre 1990, art.1, http://www.ohchr.org/french/law/crc.htm (Consulté le 21 mars 2007). 2 Ci-après ministre ou ministère des Affaires sociales. 3 The National Child Traumatic Stress Network, Understanding Child Traumatic Stress, 2005, http://www.nctsn.org/nctsn_assets/pdfs/edu_materials/understanding_child_traumatic_stress_brochure_9-29-05.pdf (Consulté le 7 mai 2007); Organisation mondiale de la Santé, Putting Women First: Ethical and Safety Recommendations for Research on Domestic Violence against Women, WHO/FCH/GWH//01.1, 2001, http://www.who.int/gender/violence/en/womenfirtseng.pdf (Consulté le 19 avril 2007). 4 Voir le chapitre III., «Le double rôle demployeur et de tuteur » pour plus de détails, ci-après. |