Africa - West

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VIII. LA REPONSE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

Les principales puissances ayant un intérêt en Afrique ont depuis longtemps professé leur désir de voir la guerre en RDC prendre fin. Elles ont consenti des efforts diplomatiques et des ressources financières pour faciliter les négociations entre les gouvernements nationaux et les mouvements rebelles à prétentions nationales qui représentent les parties en conflit. Des membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies et des missions de différents chefs d'état ont parcouru la région, tentant de rallier les soutiens en faveur de la fin du conflit. Mais ces efforts n'ont porté que sur la partie supérieure du conflit et ne sont pas parvenus à traiter les guerres locales, plus petites, elles-mêmes soutenues par la guerre plus vaste, qui ont tué des milliers de personnes248 et ravagé la vie de milliers d'autres personnes, violées, blessées ou privées de leur maison et de leurs biens. L'échec à traiter le conflit en Ituri a finalement produit une crise qui a nécessité l'intervention d'une force internationale. Si cette force n'est pas correctement soutenue et capable d'assurer la protection de la population civile en Ituri, ce conflit et d'autres similaires dans les Kivus mettront en danger tous les accords élaborés avec grand soin censés mettre un terme à la guerre au niveau national.

Les Nations Unies et la MONUC

En dépit des déclarations des Nations Unies sur la nécessité de mettre un terme à la guerre en RDC, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a mis du temps à autoriser une force pour superviser les Accords de paix initiaux de Lusaka et la force qu'il a rassemblée était petite et équipée de façon inadéquate. Le Conseil de Sécurité a initialement autorisé quelque 5 537 hommes dont 550 observateurs des Nations Unies, le reste étant des soldats chargés de les protéger et de protéger les installations des Nations Unies, mais il a fallu des années aux forces de la MONUC pour atteindre ce niveau. En charge du suivi de la mise en _uvre des accords mettant un terme aux combats entre les forces nationales, la MONUC a concentré son premier déploiement limité d'hommes, moins de 2 000 soldats, le long de la ligne de cessez-le-feu où a été enregistré un respect global des termes des traités. Mais à distance du front, les combats se sont poursuivis dans les Kivus et en Ituri où les forces mandataires et les milices locales ont repris les armes déposées par les acteurs principaux.

Des informations sur la guerre locale en Ituri étaient disponibles tant auprès des agences des Nations Unies que de sources indépendantes. Une agence des Nations Unies, activement présente en Ituri, a mis en garde dans un rapport interne de février 2001 : « La situation aujourd'hui en Ituri est hautement explosive. Des individus et des groupes de tous les côtés seraient en train de préparer de nouveaux massacres, des armes sont achetées et distribuées dans Bunia et dans ses environs. Si des actions ne sont pas entreprises immédiatement pour faire retomber les tensions, des confrontations de plus grande ampleur, plus violentes et incontrôlables sont à craindre. »249 En mars 2001, Roberto Garreton, alors Rapporteur spécial des Nations Unies pour le Congo, a publié un rapport décrivant la violence à base ethnique en Ituri et a établi un lien entre celle-ci et l'exploitation des ressources naturelles.250 Le rapport final en 2002 du Groupe des experts des Nations Unies sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et d'autres formes de richesse en RDC a décrit de façon plus détaillée le lien entre violence ethnique et le désir de l'Ouganda d'exploiter les ressources naturelles de l'Ituri.251 Le Conseil de Sécurité a invité des analystes d'associations non-gouvernementales, dont Human Rights Watch, pour informer ses membres sur les guerres locales. En septembre 2002, le Secrétaire Général des Nations Unies, dans un Rapport spécial sur la Mission des Nations Unies en RDC (MONUC) a qualifié la situation « d'explosive ».

En dépit de la quantité d'informations disponibles, certains membres des Nations Unies et certains officiels des Nations Unies n'ont pas reconnu les liens complexes entre la guerre locale et la guerre plus large et ont traité l'Ituri comme « une guerre tribale », n'entrant pas dans le champ d'action des Nations Unies. Le Représentant Spécial du Secrétaire Général, Amos Ngongi, a été cité comme ayant déclaré qu'en Ituri, « les Congolais se battent entre eux, » une conclusion très loin de décrire la complexité du conflit.252

Réticentes à s'engager encore davantage dans le volet local de la guerre, les Nations Unies ont consenti à laisser l'Ouganda continuer de contrôler l'Ituri, soit directement, soit par l'intermédiaire de ses divers substituts. Après l'établissement de la CPI en septembre 2002, la MONUC a entrepris de soutenir la nouvelle institution mais avec dix observateurs seulement, elle a manqué de moyens pour appuyer la commission et obliger l'UPC à coopérer avec elle.

A la fin de 2002, la MONUC a effectivement agi avec rapidité lorsque le MLC et le RCD-N ont avancé contre les positions du RCD-ML à Mambasa et plus au sud vers Beni. La MONUC a dénoncé cette violation du cessez-le-feu et a finalement contribué à l'établissement d'un nouveau cessez-le-feu qui a mis un terme à d'autres combats et a posté une équipe de la MONUC à Mambasa pour observer sa mise en _uvre. Peut-être parce qu'il avait enfin été forcé d'admettre que les dispositions pour mettre un terme à la guerre plus large seraient constamment menacées si la question des guerres locales n'était pas abordée, le Conseil de Sécurité a adopté la Résolution 1445 faisant passer les troupes de maintien de la paix des Nations Unies de 5 527253 hommes à 8 700 et a demandé au Secrétaire Général de placer davantage de ressources de la MONUC dans la région d'Ituri, si la sécurité le permettait. Deux ans pratiquement après les premiers signes de l'imminence de la violence, la résolution a exprimé « les profondes inquiétudes [du Conseil de Sécurité] quant à l'intensification de la violence à base ethnique dans la région de l'Ituri », a condamné la violence et l'incitation à la violence qui avait cours et a appelé les forces combattantes dans la région à prendre des mesures immédiates pour assurer la protection des civils et mettre un terme aux violations des droits humains.

Cependant, il s'est avéré difficile de trouver des troupes pour la mission en RDC. Aucun des gouvernements européens ou nord-américains n'a voulu apporter sa contribution et peu d'états africains étaient enthousiastes quant à leur participation. Dans l'attente d'une action du siège, la petite équipe de la MONUC à Bunia a tenté, là où cela était possible, de faire retomber les tensions et d'aider les civils. C'était en apparence une tâche impossible mais en certaines occasions, l'arrivée des observateurs de la MONUC sur les lieux a contribué à éviter les confrontations. Le mandat de la force autorisait les soldats à protéger les civils si ceux-ci se trouvaient confrontés à un danger imminent. La conduite de cette petite équipe a montré ce que pouvait accomplir une interprétation courageuse du mandat confié.254

En janvier 2003, la MONUC a également réalisé l'une des ses enquêtes sur les droits humains les plus complètes, étudiant les accusations contre le MLC et le RCD-N au cours de leurs activités militaires des derniers mois de 2002. La MONUC a rapporté avoir trouvé des cas de viols systématiques, de pillages, d'exécutions sommaires et dix cas confirmés de cannibalisme contre le groupe ethnique « nande ».255 Le 15 janvier, le Conseil de Sécurité a condamné « en des termes les plus fermes » les massacres systématiques et les violations perpétrés par le MLC de Bemba et le RCD-N. Exprimant des sentiments probablement partagés par d'autres membres du Conseil de Sécurité, le représentant des Etats Unis a exprimé sa révulsion quant au fait que des membres d'une faction armée censés assumer le pouvoir dans un prochain gouvernement puissent se livrer à de tels actes de torture, viol, meurtre et cannibalisme.256

Pendant le même temps, les pressions bilatérales et multilatérales se sont accrues contre l'Ouganda afin qu'il retire ses troupes d'Ituri. Mais le départ des troupes ougandaises sans une force internationale pour les remplacer allait créer un vide de pouvoir qui risquait alors d'être comblé par les groupes locaux armés. Dans la résolution 1468 du 20 mars 2003, le Conseil de Sécurité a appelé l'Ouganda à se retirer et a exprimé ses préoccupations sur le fait que l'Ouganda ne s'était pas préalablement retiré selon le calendrier prévu. Le Conseil a également souligné auprès du Rwanda que tout retour de ses forces « serait inacceptable. » Le Conseil a également demandé au Secrétaire Général d'augmenter les effectifs de la MONUC en Ituri et de soutenir la Commission de Pacification en Ituri.257

Après qu'un massacre à Drodro eut fait la une de l'actualité258 et avec le retrait imminent de l'armée ougandaise, la MONUC a annoncé le 23 avril que ses effectifs en Ituri passeraient à 850 dont 200 hommes seraient immédiatement envoyés à Bunia. Le retrait ougandais le 6 mai 2003 a entraîné la vacance de pouvoir qui avait été redoutée. Les troupes de la MONUC nouvellement arrivées composées d'unités de gardes uruguayens n'avaient pas la capacité de prévenir les combats à Bunia alors que les groupes armés hema et lendu rivalisaient pour le contrôle de la ville pendant tout le mois de mai. Le 30 mai 2003, le Conseil de Sécurité a autorisé une Force Multinationale Intérimaire d'Urgence pour l'Ituri avec un mandat Chapitre VII, reconnaissant ainsi le besoin urgent de protéger les civils, y compris par le recours à la force si nécessaire. Mais cette mesure de court terme arrive à échéance le 1er septembre 2003 lorsqu'un contingent de troupes du Bangladesh doit venir renforcer les troupes de la MONUC à Bunia. Au moment de la rédaction de ce rapport, il n'y a pas d'indication claire sur la façon dont la MONUC, avec un mandat Chapitre VI beaucoup plus faible, sera en mesure de protéger les civils, dans Bunia ou dans ses environs après le départ de la force d'urgence.

Dans sa résolution du 20 mars 2003, le Conseil de Sécurité a condamné les violations des droits humains commises en RDC, en particulier en Ituri. Il a affirmé que des membres du MLC, du RCD-ML et de l'UPC avaient perpétré ces crimes et qu'ils seraient tenus pour responsables de leurs actions. La CPI aura compétence pour lancer une investigation pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis après juillet 2002. Cependant, il est beaucoup moins clair quel sera le mécanisme - s'il y en a un - qui sera mis en place pour enquêter sur ces crimes internationaux commis avant cette date et les traduire en justice. Le Conseil de Sécurité a demandé au Secrétaire Général, en consultation avec le Haut commissariat aux droits de l'homme, de faire des recommandations au Conseil sur la façon dont traiter la question de la justice pour ces crimes.

Les bailleurs internationaux

Les gouvernements de l'Ouganda, du Rwanda et de la RDC dépendent fortement de l'assistance des bailleurs, une situation qui pourrait offrir aux principaux bailleurs un moyen significatif pour influencer leurs décisions politiques. Ces bailleurs déclarent souvent qu'ils s'engagent individuellement, en tant que membres des Nations Unies et en tant que membres des institutions financières internationales à mettre un terme à la guerre en RDC, en partie parce qu'ils savent que le conflit et les dépenses militaires qui lui sont liées entravent la réduction de la pauvreté et le développement économique qu'ils cherchent à promouvoir. Les bailleurs savent également que l'assistance qu'ils accordent pour le développement économique ou pour l'aide humanitaire est fongible, à savoir que les fonds donnés dans un but précis, comme l'éducation, libèrent de l'argent qui peut être dépensé pour un autre objectif, comme l'achat d'armes. Les bailleurs doivent trouver des moyens efficaces pour suivre l'utilisation des fonds qu'ils remettent. Sans cela, ils courent le risque de financer une guerre supplémentaire ainsi que les violations des droits humains qui l'accompagnent.

Pour l'année fiscale 2000 à 2001, les bailleurs internationaux ont financé 55 pour cent du budget de l'Ouganda soit un total de 582,2 millions de dollars US. Depuis 2000, l'Ouganda a également bénéficié d'une remise de dette d'environ 2 millions de dollars US de sources diverses. Le Fonds Monétaire International (FMI) a approuvé en septembre 2002 un nouvel accord de trois ans dans le cadre de la Facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance d'un montant de 17,8 millions de dollars US pour l'Ouganda. Au même moment où se concluaient ces nouveaux engagements, l'Ouganda a dépassé son budget de la défense de plus de 30 pour cent, selon des estimations formulées par l'International Institute of Strategic Studies.259 Il a également fait basculer des dépenses d'autres ministères vers ses budgets de la défense et de la sécurité.260 Le Ministre de la défense a admis en 1999 lors d'une enquête que le Ministère de la défense avait dissimulé ses dépenses derrière d'autres lignes budgétaires afin d'éviter la pression des bailleurs.261

En dépit de leur désir affirmé de mettre un terme à la guerre en RDC, les bailleurs ont échoué à utiliser efficacement les moyens dont ils disposaient et pendant des années, ont fait peu de progrès pour persuader les parties de cesser le conflit. En 2002, les bailleurs multilatéraux et bilatéraux ont tous pris des positions plus fermes. En mai, le Fonds Monétaire International (FMI) a lié la reprise de son aide à la RDC à des progrès supplémentaires dans le processus de paix (et également à des progrès dans la poursuite des réformes économiques).262 Les Etats Unis ont également refusé de soutenir un appel du Rwanda au renouvellement de l'aide qu'il reçoit du FMI et selon des sources au Département d'Etat, les Etats Unis ont affirmé aux autorités rwandaises que leur position était une réponse à la présence continue du Rwanda en RDC et aux abus contre les droits humains commis par les forces rwandaises sur place.263 Le gouvernement danois a coupé son aide à l'Ouganda début 2002 suite à des préoccupations sur les activités militaires ougandaises en RDC.264 Face à ces cas de pression accrue et probablement à d'autres également, le Rwanda et l'Ouganda ont retiré leurs unités militaires régulières en 2003, remplissant ainsi un objectif politique majeur de nombreux bailleurs. Ces deux pays ont conservé une influence suffisante auprès des acteurs congolais pour protéger leurs intérêts, tant en Ituri qu'ailleurs.

Les bailleurs ont soulevé des préoccupations relatives aux droits humains mais ont utilisé les moyens dont ils disposaient de façon encore moins efficace sur ces questions que sur celle concernant l'arrêt de la guerre. Suffisamment bien informés sur les abus contre les droits humains par leurs propres ambassades, par les agences des Nations Unies et par les organisations de défense des droits humains nationales et internationales, les bailleurs n'ont pas réussi à amener les gouvernements et les autres acteurs à mettre un terme aux abus en RDC, ni à punir les auteurs de ces actes dans leurs rangs.

L'Union Européenne

Jusqu'à la mi-2002, l'Union Européenne (UE) a largement prouvé son inefficacité pour influencer les développements en RDC parce que les états membres de premier plan étaient divisés sur le choix du camp à soutenir : le Royaume Uni, généralement soutenu par l'Allemagne et les Pays Bas appuyaient le Rwanda et l'Ouganda alors que la France, souvent avec la Belgique, appuyaient le gouvernement de la RDC. Tout au long de la guerre, l'UE a fait plusieurs déclarations dénonçant la violence contre les civils dont une en février 2001 qui identifiait le rôle de l'Ouganda dans l'exacerbation du conflit entre les Hema et les Lendu. Il était noté : « la présence militaire continue de l'armée ougandaise dans cette partie de la RDC ... entrave les efforts pour y rétablir la paix. »265 Cependant, cette réprimande mise à part, l'UE a peu fait publiquement pour exercer des pressions sur l'Ouganda afin que ce pays change de comportement.

Les membres de l'UE souscrivent à un Code de conduite sur l'exportation des armes qui interdit les transferts d'armes pouvant « aggraver des tensions existantes ou des conflits armés dans le pays de destination finale » ou qui risquent d'alimenter les abus contre les droits humains. Cependant, ils n'ont rien fait pour stopper la livraison d'armes à la région des Grands Lacs, une région où la pléthore d'armes a certainement contribué aux abus contre les droits humains. En juin 1999, une déclaration présidentielle de l'UE rappelait aux membres leur obligation de respecter le Code de conduite mais un an plus tard, en mai 2000, les membres ne parvenaient toujours pas à se mettre d'accord sur une suspension des livraisons d'armes à la région des Grands Lacs, certains avançant comme argument qu'un tel embargo serait toujours violé. Mais les 22 et 23 janvier 2001, le Conseil des affaires générales a décidé de demander aux instances européennes appropriées de faciliter à l'avance des recommandations sur « un possible embargo et sur ses modalités pour contenir le flux d'armes qui alimentait et prolongeait le conflit en RDC et dans la région des Grands Lacs. »

Au cours de l'année dernière, des efforts auraient été faits pour garantir une politique européenne plus cohérente sur les Grands Lacs. En janvier 2002, les Ministres français et britannique des affaires étrangères ont effectué une mission commune dans la région des Grands Lacs, censée promouvoir la paix dans la région et tenter d'unifier la politique européenne sur la zone, avec une visite de suivi prévue en 2003. Le rôle de l'UE en RDC et spécifiquement en Ituri, a reçu un coup de fouet non négligeable avec l'accord faisant de l'UE le chef de file de la Force Multinationale Intérimaire d'Urgence en Ituri dans le cadre du Pacte européen de sécurité et de défense, créant la première occasion d'utilisation de cette force hors d'Europe. Bien que la France prenne un rôle de premier plan dans la force multinationale, le Royaume Uni enverra également un petit nombre de troupes.

Le Royaume Uni

Le Premier Ministre, Tony Blair a publiquement déclaré en octobre 2001 que « la communauté internationale pouvait ... avec notre aide résoudre la situation néfaste que constitue le conflit permanent en République Démocratique du Congo, où trois millions de personnes sont mortes de la guerre ou de la famine au cours de la dernière décennie. »266 En étant le plus important bailleur bilatéral de l'Ouganda et le second bailleur du Rwanda, le RU apparaît bien placé pour faire pression sur ces gouvernements afin qu'ils changent leur conduite en RDC. L'ancien Secrétaire d'Etat pour le développement international, Clare Short, a déployé des efforts considérables pour tenter de réduire les tensions et éviter une guerre possible entre le Rwanda et l'Ouganda mais n'a pas fait d'efforts similaires pour tenter de mettre un terme aux abus contre les droits humains dans certaines parties de la RDC contrôlées par l'Ouganda ou le Rwanda.

Le gouvernement du Royaume Uni, comme beaucoup d'autres bailleurs, apporte maintenant son assistance sous la forme d'un soutien à la balance des paiements des gouvernements de l'Ouganda et du Rwanda. Ceci signifie que les fonds sont donnés sans qu'ils soient liés à des projets spécifiques. Reconnaissant la possibilité que de telles contributions non-limitées finissent par couvrir des dépenses militaires, le RU a exhorté les autorités ougandaises à revoir leurs dépenses militaires et en 2001, le RU a commencé à examiner de telles dépenses dans le but d'assurer une plus grande transparence. A ce jour, les résultats de cette mesure ne sont pas connus. Dans le même temps, le gouvernement britannique a continué à soutenir l'Ouganda et le Rwanda politiquement et financièrement. Les autorités britanniques se sont dans l'ensemble abstenues de toute critique ouverte à l'encontre de l'Ouganda ou du Rwanda. Si ces autorités ont exercé des pressions privées pour persuader ces pays de stopper les violations des droits humains commises par leurs soldats ou par les groupes contrôlés par leurs soldats en RDC, de telles pressions ont produit peu de résultats visibles.

Le parlement britannique a été plus critique sur cette guerre continuelle et sur son coût pour les civils. Dans un rapport de novembre 2002, le Groupe multipartite pour les Grands Lacs et la prévention d'un génocide exprimait ses préoccupations sur le rôle de l'Ouganda en RDC et exhortait à ce que « les allégations sur le rôle de l'armée ougandaise dans l'exploitation des ressources et les violations des droits humains, en particulier dans la région de l'Ituri » soient complètement évaluées quand sera mesuré le succès de l'assistance britannique à l'Ouganda.

Les Etats Unis

Les Etats Unis ont depuis longtemps fourni un soutien substantiel à l'Ouganda, non pas seulement à cause de son succès apparent dans le domaine du développement économique et de la lutte contre le VIH/SIDA mais aussi parce qu'il a offert son assistance pour restreindre le pouvoir du Soudan, considéré par les Etats Unis comme une menace majeure sur la stabilité dans le Nord-Est de l'Afrique. Pour l'année fiscale 2001, les Etats Unis ont apporté 81 millions de dollars US d'aide au développement et d'aide alimentaire à l'Ouganda. Pour l'année fiscale 2002, l'assistance américaine a atteint un total d'environ 71,8 millions de dollars US et environ 70 millions de dollars US ont été demandés pour 2003.

En décembre 2002, l'administration Bush a certifié que l'Ouganda pouvait être admis dans la catégorie des pays à statut commercial privilégié dans le cadre de la Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (AGOA), un programme censé comporter parmi ses critères de sélection, les performances réalisées dans le domaine des droits humains. En 2001, le Département d'Etat américain dans son rapport annuel Country Reports on Human Rights Practices a critiqué les soldats ougandais pour leurs abus contre les droits humains en RDC mais l'année suivante, le rapport affirmait qu'il n'y avait pas « de rapports confirmés » d'abus supplémentaires dans ce pays en 2002. Le rapport 2002 a effectivement pris note que des milliers de civils avaient été tués par la violence entre Hema et Lendu dans les zones sous influence de l'armée ougandaise.

En mars 2003, le Sous-Secrétaire d'état des Etats Unis pour les affaires africaines, Walter H. Kansteiner III a rencontré le Président Museveni en Ouganda pour discuter des questions bilatérales et régionales mais il n'a fait aucune référence publique aux abus associés à la présence de l'Ouganda en RDC. De la même façon, la Maison Blanche n'a publié aucune déclaration critique sur les actions de l'Ouganda en RDC après une réunion en juin 2003 entre les Présidents Bush et Museveni. Cependant, selon des rapports de presse et d'autres sources, Bush aurait critiqué en privé le rôle de l'Ouganda en Ituri.

Dans une audience sur les Grands Lacs devant le Sous comité Afrique du Comité de la chambre des représentants sur les relations internationales, le 3 avril 2003, le Sous-Secrétaire d'état adjoint, Charles Snyder, s'est largement concentré sur les développements politiques et humanitaires en RDC. Il a insisté sur la nécessité du retrait des troupes ougandaises et a seulement affirmé que les Etats Unis avaient un engagement « constant et actif » sur la question des droits humains, sans donner de détails.

Dans un document de mars 2003 sur l'AGOA, les autorités américaines ont décrit le bilan du Rwanda en matière de droits humains comme « faible », une évaluation qui fait écho au Country Reports on Human Rights Practices qui critiquaient ces dernières années la conduite des troupes rwandaises en RDC. Dans l'audience donnée en avril 2003 par Snyder, ce dernier appelait le Rwanda à cesser son soutien aux troupes congolaises, y compris l'UPC et à garder ses soldats hors de la RDC. La décision du Département d'Etat de refuser de soutenir le renouvellement de l'aide du FMI au Rwanda aurait eu plus de poids auprès des autorités rwandaises si cette position n'avait pas été amoindrie par une attitude plus conciliante envers le Rwanda au Conseil pour la Sécurité Nationale, l'instance de la Maison Blanche en charge de la politique étrangère. Dans un cas similaire, le Département d'Etat a tenté de suspendre la participation du Rwanda à l'International Military Education and Training Program (IMET, Programme international d'éducation et de formation militaire) géré par l'armée américaine à cause des activités rwandaises en RDC mais cette position a été rejetée par l'administration Bush. L'administration a également décidé d'admettre le Rwanda au programme AGOA en dépit de son « faible » bilan sur les droits humains.

248 International Rescue Committee, "Mortality in the Democratic Republic of Congo: Results from a Nationwide Survey", avril 2003. Selon ce rapport, les estimations varient entre 3 et 4,7 millions de morts dans tout le Congo depuis le début de la guerre.

249 Document interne des Nations Unies, février 2001.

250 Commission des Droits de l'Homme, Rapport du Rapporteur spécial sur la question de la violation des droits humains et des libertés fondamentales en RDC, E/CN.4/2001/40/Add.1, 27 mars 2001.

251 Conseil de Sécurité des Nations Unies, « Rapport final du groupe d'experts sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et autres formes de richesse en DRC », S/2002/1146, 16 octobre 2002.

252 Réseau Régional Intégré d'Information (IRIN), Rapport spécial sur l'Ituri, décembre 2002.

253 Bien que le Conseil de Sécurité ait initialement autorisé une force de 5 537 hommes, le déploiement initial d'hommes n'a pas atteint ce total maximal.

254 Entretien conduit par Human Rights Watch, Bunia, février 2003.

255 "North Kivu: MONUC Investigation", Communiqué de presse de la MONUC, 18 février 2003.

256 Remarques de l'Ambassadeur Richard S. Williamson, Représentant aux Nations Unies pour les affaires politiques spéciales sur la République Démocratique du Congo, Conseil de Sécurité, 13 février 2003. A ce jour, le rapport d'enquête n'a pas été publié.

257 Conseil de Sécurité des Nations Unies, Résolution 1468, 20 mars 2003.

258 Le bilan initial des victimes de ce massacre a été très fortement exagéré avec des rapports avançant le chiffre de presque 1000 morts. Des investigations ultérieures ont révélé un nombre de morts bien inférieur mais ce massacre fut symptomatique des tueries se produisant en Ituri.

259 IISS fait des estimations de dépenses militaires plutôt que d'utiliser les chiffres rapportés. Ce chiffre est basé sur des estimations provenant de plusieurs publications de l'IISS (Military Balance), 1997-2001.

260 République de l'Ouganda, Semi-annual Budget Performance Report FY 2001 / 02, MFPED, avril 2002

261 "Creative Accounting in Africa: Hidden skills", The Economist, 9 octobre 1999.

262 "IMF dangles aid carrot for Congo", BBC New Online, 1er mai 2002.

263 Entretien conduit par Human Rights Watch, Washington, 23 juillet et 8 octobre 2002.

264 "Denmark cuts Aid to Kampala," The New Vision, Kampala, 1er février 2002.

265 Union Européenne, "Declaration of the Presidency on behalf of the European Union on the Hema-Lendu conflict in north-eastern DRC," Bruxelles, 1er février 2001.

266 Premier Ministre, Tony Blair à la Conférence du Parti travailliste, octobre 2001.

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