Rapports de Human Rights Watch

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Liens entre la guerre et l'opposition interne: l'appel de l'ethnicité

 

Même avant l'invasion, le FPR avait recruté un petit nombre de partisans, Hutu et Tutsi, au Rwanda mais la plupart des Tutsi n'avaient pas de liens avec le mouvement de guérilla et certains s'opposaient activement à l'invasion, se souvenant des massacres de civils tutsis qui avaient suivi les incursions des années 60. Habyarimana et ses partisans auraient pu choisir d'en appeler au nationalisme pour lutter contre le FPR mais ils ont plutôt décidé de présenter la guerre comme une menace à caractère ethnique. Ils croyaient peut-être qu'il serait plus facile de rallier à nouveau tous les Hutus derrière le leadership d'Habyarimana si la menace était clairement identifiée comme étant tutsie. (Bien que le FPR ait été majoritairement tutsi, son président était un colonel hutu, jadis partisan puis rival d'Habyarimana, qui avait fui le Rwanda quelques années auparavant lorsqu'il avait été accusé d'avoir ourdi un coup d'Etat.)

 

Mais apparemment, Habyarimana et ses partisans étaient également mus par une autre considération: la crainte que l'opposition interne croissante ne s'associe au FPR. En identifiant les Tutsis à l'ennemi, Habyarimana et ses partisans espéraient rendre impensable la coopération entre l'opposition interne et le FPR. Au départ, cet espoir était malvenu: les principaux partis politiques opposés à Habyarimana (l'un à majorité hutue, un autre ethniquement mixte et le dernier fortement influencé par les Tutsis) avaient commencé à coopérer ouvertement avec le FPR en 1992. Même si cette collaboration n'a pas duré et que certaines allégeances au sein de l'opposition se sont par la suite tournées vers le camp Habyarimana (voir plus loin), ce sont ces principaux partis d'opposition qui, en combinaison avec les pressions internationales, ont incité le gouvernement à entamer des pourparlers avec le FPR. Habyarimana et ses partisans ont entamé ces négociations en juillet 1992, avec le sentiment que les deux crises que constituaient la guerre et l'opposition interne s'étaient fondues en une seule menace mettant sérieusement à mal le maintien de leur contrôle.

 


<  |  index  |  suivant>>avril 2006