rapport mondiale 2003
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Rapport Mondial 2003

Rwanda

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La situation des droits humains
Défendre les droits humains
Le rôle de la communauté internationale

La situation des droits humains

Le Gouvernement rwandais dominé par le Front Patriotique rwandais a témoigné d'une hostilité constante envers l'opposition politique, la liberté de la presse et la société civile indépendante alors qu'il préparait une nouvelle Constitution et l'organisation d'élections nationales en 2003. Huit ans après le génocide de 1994 qui a causé la mort d'au moins un demi-million de Tutsis, le Gouvernement a lancé les gacaca, une forme de justice novatrice, participative et sous contrôle de l'Etat, destinée à accélérer les procès pour génocide et à promouvoir la réconciliation. Mais son souci de justice a des limites: il a refusé que les juridictions gacaca se saisissent des accusations de crimes de guerre à l'encontre des Forces de Défense Rwandaises (FDR, anciennement Armée Patriotique Rwandaise, APR) et a tenté d'empêcher le Tribunal pénal international des Nations Unies pour le Rwanda d'enquêter sur des suspects des FDR. Face aux pressions internationales croissantes concernant la présence de ses troupes en République Démocratique du Congo (RDC), le Rwanda a signé un traité de paix avec la RDC et a retiré l'essentiel de ses soldats, laissant toutefois non résolue la question des responsabilités pour les crimes de guerre commis sur place.

En avril, les autorités ont arrêté l'ancien Président Pasteur Bizimungu et l'ancien ministre Charles Ntakirutinka, accusés d'atteinte à la sécurité de l'Etat, d'attiser les divisions ethniques et d'être impliqués dans des activités politiques interdites. Neuf mois auparavant, les deux hommes avaient formé un nouveau parti politique, le PDR-Ubuyanja, que le Gouvernement a déclaré illégal bien qu'aucune loi ne l'y autorise. En 2001, les autorités ont confisqué les notes et enregistrements de journalistes qui avaient interviewé Bizimungu et ont obligé, en une occasion, des diplomates à quitter sa maison. Elles ont ensuite saisi toutes les copies d'un mémoire rédigé par Bizimungu et qu'il avait essayé de publier à la fin 2001. La foule s'en est pris en toute impunité aux personnes de Bizimungu et de Ntakirutinka. En décembre 2001, des assaillants demeurés inconnus ont assassiné un autre fondateur du PDR-Ubuyanja, Gratien Munyarubuga, en pleine journée dans la capitale, Kigali. A la fin 2001, les autorités ont détenu pendant un mois une de ses sympathisantes, Catherine Mujawamariya, et ont arrêté vingt-quatre autres suspects dont le trésorier de la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l'homme (LIPRODHOR) ainsi qu'un employé rwandais de l'ambassade des Etats-Unis. Certains ont été libérés dans les deux mois mais d'autres sont restés en détention plus longtemps. Avant son arrestation, Bizimungu avait vu sa liberté de mouvements restreinte par les autorités qui lui avaient même interdit de se rendre à la messe. Dans un discours largement rendu public devant une audience internationale, le Président Paul Kagamé avait prévenu que personne ne serait en mesure de protéger Bizimingu ni les autres opposants si le Gouvernement venait à perdre patience envers eux. Les tribunaux ont rejeté les demandes de remise en liberté provisoire déposées par Bizimungu et Ntakirutinka et en novembre, ils se trouvaient toujours en prison.

En janvier, le Gouvernement a arrêté le secrétaire-général du Mouvement démocratique républicain (MDR), Pierre Gakwandi, l'accusant d'avoir attiser la division ethnique et diffamé le Gouvernement. Le parlementaire Jean Mbanda, arrêté pour sa part en 2000 pour avoir publié des critiques envers le Gouvernement, restait en prison sans procès sous l'accusation de corruption.

En mars, les responsables locaux ont été élus au niveau des cellules (la plus petite unité locale administrative du Rwanda) mais les partis politiques avaient été interdits de faire campagne. Les partis avaient été confrontés aux mêmes restrictions lors des élections de districts en 2001 et semblaient devoir l'être toujours en vertu de la nouvelle constitution. En novembre, une commission gouvernementale a publié le projet qui, s'il est approuvé, n'autorisera les partis à opérer qu'aux niveaux national et provincial, mais pas au niveau local.

Une nouvelle loi punissant toute déclaration ou activité considérée comme promouvant la discrimination ou le sectarisme est entrée en vigueur en février. Les tribunaux peuvent dissoudre les partis politiques et les organisations non-gouvernementales (ONG) jugés coupables de sectarisme et annuler les résultats des élections si un candidat a recouru à la discrimination ou au sectarisme.

Une loi censée garantir la liberté de la presse a pris effet en juillet mais le Gouvernement a déjà fermé trois journaux et harcelé un autre. A la fin décembre 2001, la police a détenu le rédacteur en chef du journal Le Partisan pendant trois jours en raison de la publication d'articles critiquant le Gouvernement. Après sa libération, il a fui le pays et le journal s'est effondré. En janvier, la police a arrêté Laurien Ntezimana et Didace Muremangingo du journal Ubuntu et ils ont été accusés d'avoir attenté à la sécurité de l'Etat pour avoir publié le terme "ubuyanja", qui signifie "renouveau" et renvoyait au nom du parti fondé par Bizimungu. Remis en liberté provisoire en février, ils ont reçu l'ordre de ne pas quitter la ville de Butare sans autorisation tandis qu'un administrateur provincial interdisait la publication et la distribution d'Ubuntu. Le Gouvernement a par ailleurs expulsé en mai le rédacteur en chef du New Times, originaire d'Ouganda sous prétexte d'enfreinte aux lois sur l'immigration peu après qu'il eut publié un éditorial appelant à la libération de Bizimungu. En janvier, le Ministre chargé de la presse a accusé le journal Umuseso d'avoir publié une propagande incitant à la division, le comparant aux journaux qui incitaient au génocide en 1994. En mai, la police a interrogé le rédacteur en chef d'Umuseso après qu'il se fut moqué d'un discours présidentiel et en juillet, trois journalistes de ce journal ont été détenus pendant deux semaines parce qu'ils s'étaient arrêtés pour observer la conduite de la police au cours d'une bagarre.

La nouvelle loi sur la presse prévoit de lourdes peines à l'encontre des journalistes, des éditeurs et même des vendeurs de journaux dans la rue si les publications commettent une des nombreuses infractions prévues par la loi, à savoir, attenter à la loi et à l'ordre, diffamer les autorités et saper le moral de l'armée. Une disposition de la loi permet d'obtenir des licences pour des stations de radio et télévision privées. Mais elle instaure également un conseil national de la presse opérant sous l'autorité du Président et habilité à accréditer ou interdire les publications et à fermer les radios et télévisions.

Le Gouvernement a par ailleurs demandé aux ONG locales et internationales de se faire enregistrer aux termes d'une loi adoptée en 2001. Bien que cette loi garantisse aux autorités des pouvoirs assez larges pour se mêler du travail de ces organisations, il semble qu'elles aient accordé l'enregistrement à la plupart de celles qui le demandaient y compris des organisations critiques envers le Gouvernement, à l'exception de l'Association des modestes et des innocents (AMI), une petite organisation qui assurait des cours sur la réconciliation auprès d'institutions éducatives et religieuses et qui publiait Ubuntu. L'administrateur provincial de Butare a interdit l'AMI de toute activité et a prévenu ses membres qu'ils ne pourraient reprendre leur travail que s'ils se dissociaient des éditeurs d'Ubuntu, Ntezimana, un théologien laïque respecté et autrefois récipiendaire du Prix Pax Christi et Muremangingo, un jeune rescapé du génocide.

Les gacaca ont été lancées dans douze juridictions pilote en juin et ont été étendues par la suite à quelque 11.000 juridictions pour juger plus de 100.000 détenus accusés de génocide, la plupart ayant croupi depuis 1994-1995 dans des conditions inhumaines dans des prisons et cachots surpeuplés. En octobre 2001, environ 250.000 "personnes intègres" ont été désignées comme juges et ont reçu à cet effet six jours de formation. Dans certains cas, les instructeurs étaient eux-mêmes mal informés et divergeaient par exemple sur des questions importantes comme la distinction entre homicide volontaire et involontaire.

Au niveau des cellules, les tribunaux gacaca comprennent dix-neuf juges qui établissent la liste des victimes et des personnes accusées et classent les accusés dans l'une des quatre catégories correspondant à la gravité du crime commis. Ils entendront ensuite les affaires d'atteinte à la propriété. Les tribunaux de secteurs jugeront ceux qui sont accusés d'agression ou d'homicide involontaire et les tribunaux de district ceux accusés d'homicide volontaire. Les tribunaux classiques gardent autorité sur les plus de 2.000 personnes accusées d'être des responsables de haut-niveau, des tueurs notoires et des violeurs et qui encourent la peine de mort. En septembre 2002, les procureurs avaient déjà enregistré environ 20.000 confessions de détenus susceptibles de bénéficier de réduction de peine ou d'une commutation de la moitié de leur peine en travaux d'intérêt général si leur confession est acceptée. De nombreux détenus, ayant déjà passé des années en prison, pourraient ainsi bénéficier d'une relaxe ou rejoindre les travaux d'intérêt général dès leur confession acceptée.

Bien que le Président ait signé l'arrêté autorisant les travaux d'intérêt général en février, au moment où nous écrivions le Gouvernement n'avait pas organisé leur mise en oeuvre ni assuré leur financement, ni n'avait préparé les rescapés au retour des assassins ayant confessé leur crime.

Les gacaca posent plusieurs problèmes sur la question des droits humains. Les accusés, par exemple, n'ont droit à aucun conseiller juridique. Compte tenu du peu de formation des juges, des personnes accusées de crimes similaires peuvent se trouver versées dans différentes catégories et ainsi encourir des disparités de peines. L'impartialité des juges a été sujette à caution dans plusieurs communautés et, dans plusieurs affaires, ceux qui ont été eux-mêmes accusés d'avoir participé au génocide ont dû démissionner. En outre, les peines pour viol risquent de violer le principe de non-rétroactivité dans la mesure où la loi des gacaca prévoit de longues peines de prison, voire la peine de mort, alors que la législation antérieure ne prévoyait que des peines de cinq à dix ans d'emprisonnement. Aucune protection n'est prévue pour les témoins ni les détenus qui témoignent en public, ce qui rend difficile pour les Tutsis - petite communauté dans la plupart des localités - d'accuser d'autres personnes.

La loi instaurant les juridictions gacaca les autorisait à entendre les faits relatifs aux crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Le Président Kagame et d'autres responsables du Gouvernement ont toutefois répété à plusieurs reprises que ces tribunaux ne sauraient entendre des accusations de tels crimes à l'encontre de soldats des FDR qui devraient plutôt être jugés par des tribunaux classiques, une attitude qui continue à poser problème dans plusieurs localités. Des problèmes se sont parfois posés pour réunir le quorum requis de cent adultes lors de certaines sessions de gacaca et les autorités ont menacé de punir les absents d'amende ou d'autre sanction ou de faire appel aux Forces de défense locale, force paramilitaire du Gouvernement, pour rendre la présence obligatoire.

Le système judiciaire classique a mal fonctionné, en partie à cause d'un manque de ressources et aussi en raison d'interférences du pouvoir exécutif. En mars, six juges de la Cour Suprême ont été obligés de démissionner, accusés de corruption. Pendant le premier trimestre de 2002, les tribunaux classiques n'ont jugé que 757 personnes pour des crimes de génocide (de 1997 à juin 2002, les tribunaux ont jugé 7.211 personnes, dont 1.386 furent acquittées et 689 condamnées à mort, même si aucune exécution n'a été pratiquée depuis 1998). Le taux d'acquittements est passé de 22 pour cent en 2001 à près de 27 pour cent pendant le premier trimestre de 2002, tandis que celui des condamnations à mort chutait de façon drastique pendant la même période, passant de 8,4 pour cent en 2001 à 3,8 pour cent. En juillet, les procureurs ont lancé la dernière série d'initiatives en date pour résoudre le problème des détenus dont les cas n'avaient jamais fait sérieusement l'objet d'une enquête, présentant 750 détenus (sur 7.000) dont les dossiers étaient trop légers devant les communautés locales afin de recueillir des témoignages directs. Au total, quatre-vingts ont été remis en liberté provisoire faute de preuve crédible.

En juin, le Ministère des affaires locales et les autorités locales ont ordonné à la police et aux membres des Forces de défense locales de regrouper les centaines d'enfants des rues de Kigali. Ils les ont détenus dans des centres surpeuplés qui manquaient d'eau, de nourriture, de services sanitaires et de personnel de surveillance. Un membre des Forces de défense locales aurait tiré sur un enfant qui essayait de s'échapper du centre de détention. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a réagi tardivement et sans assez de vigueur quand les autorités rwandaises se sont livrées au regroupement forcé des enfants des rues et les ont emprisonnés dans des conditions de misère.

En septembre, le Rwanda a retiré l'essentiel de ses troupes stationnées en RDC, comme prévu par le traité de paix signé le 30 juillet avec le Gouvernement de Kinshasa. Dans les mois qui avaient précédé, les troupes rwandaises avaient mené l'offensive contre les Banyamulenge, population congolaise d'origine rwandaise, dont la protection avait été un temps avancée pour justifier l'intervention militaire rwandaise et avaient participé à plusieurs autres combats pour venir en aide à leurs alliés locaux du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Les troupes rwandaises auraient également prêté main forte aux combattants du RCD dans l'écrasement d'une mutinerie à Kisangani au cours de laquelle plus d'une centaine de civils avaient été tués. Au cours des neuf premiers mois de l'année 2002, comme les années précédentes, les soldats rwandais ont été accusés de nombreux crimes de guerre comme des assassinats et des viols. Les autorités militaires ont assuré que de tels crimes avaient été punis et que plusieurs soldats des FDR avaient été arrêtés, mais aucune condamnation n'avait été annoncée au moment où nous écrivions.

Après avoir pendant des années encouragé les Congolais d'origine rwandaise à fuir vers le Rwanda, les autorités rwandaises avec la coopération du RCD ont rapatrié de force au début du mois d'août plus de 9.000 de ces personnes qui s'étaient réfugiées côté rwandais en 1996.

L'intention, derrière cette décision, peut avoir été d'aider à étendre une base-arrière d'alliés potentiels pour le RCD. Les responsables rwandais ont obligé les réfugiés à détruire leurs abris et à fermer les écoles qui accueillaient plusieurs milliers d'enfants dans les camps installés à l'intérieur du Rwanda. Ceux qui furent ainsi renvoyés côté RCD ont éprouvé un manque de nourriture, d'eau et de soins médicaux, en partie parce que le RCD refusait d'autoriser les organisations humanitaires à se rendre auprès d'eux.

Défendre les droits humains

La LIPRODHOR, organisation la plus indépendante du pays, a pu travailler avec bien moins de tracas de la part des autorités que les années précédentes (en dépit de l'arrestation de son trésorier - voir plus haut). Elle a été enregistrée par les autorités et a commencé à publier un nouveau mensuel consacré aux droits humains.

En revanche, assurant que des documents avaient disparu de son dossier de demande d'enregistrement, la Ligue des droits de l'homme dans la région des Grands Lacs (LDGL) s'est retrouvée en but aux attaques d'un ministre du Gouvernement l'accusant de ne pas s'être conformée aux nécessités de l'enregistrement officiel et à celui des agents de sécurité qui se sont rendus dans ses bureaux. Dans un échange de lettres publiées par Umuseso, un membre de la Commission gouvernementale des droits de l'homme a accusé le secrétaire général de la LDG de chercher à minimiser l'ampleur du génocide.

Dans un rapport couvrant l'année 2001, la Commission Nationale des Droits de l'Homme a évoqué des questions sensibles comme le droit à la terre et les détentions illégales mais n'a pas dit grand chose des arrestations politiques. Un membre de la Commission a cherché, en privé, à justifier l'arrestation de Ntezimana et de Muremangingo dans le cadre de l'affaire Ubuntu.

Le rôle de la communauté internationale

La justice internationale
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a connu l'année la plus mouvementée depuis sa création. Peu après que le Procureur Carla Del Ponte eut annoncé son intention d'inculper des soldats des FDR pour crimes de guerre commis en 1994, dans le cadre du mandat assigné au TPIR, les organisations de rescapés du génocide ont appelé en janvier les témoins de l'accusation à boycotter le TPIR pour plusieurs raisons, notamment les mauvais traitements supposés infligés aux témoins. En juin, le Gouvernement a imposé de nouvelles restrictions aux voyages des témoins de l'accusation qui ont perturbé le déroulement de trois procès et a refusé à l'accusation l'accès à certains documents dont elle avait besoin. Mme Del Ponte a informé le Conseil de sécurité des Nations Unies de ces obstructions en juillet.

L'ONU a retardé pendant trois mois l'approbation du budget biennal du Tribunal, se montant à 192 millions de dollars US, parce que le TPIR n'était pas en mesure de présenter une stratégie claire visant à boucler tous les procès d'ici 2008. Sous la pression des Etats-Unis, l'ONU a finalement approuvé en août le recrutement de juges temporaires pour débloquer les dossiers en suspend mais ces juges ne se mettront au travail qu'en 2003. Même avec le recours à des juges temporaires, l'objectif initial du Procureur de prononcer 136 nouvelles inculpations risque de noyer un tribunal qui compte déjà plus de cinquante suspects en détention préventive et n'a prononcé que huit jugements entre janvier 1997 et octobre 2002. En octobre, le Procureur a revu son plan à la baisse et ne prévoit plus que 26 nouvelles inculpations.

Le Tribunal a amendé ses règles de fonctionnement pour permettre le transfert de suspects vers des tribunaux nationaux pour qu'ils y soient jugés, en accord avec les Etats qui ont procédé aux arrestations. Il semble peu probable que la plupart des Etats acceptent de transférer ces personnes au Rwanda, tout au moins pas tant que la peine de mort y sera en vigueur.

Après que les Etats-Unis eurent promis une prime de 5 millions de dollars en échange d'informations permettant l'arrestation des dix suspects les plus en vue, le TPIR a pu arrêter l'ancien chef d'état-major rwandais, le général Augustin Bizimungu; l'ancien préfet de Kigali, le colonel Tharcise Renzaho; et l'ancien maire de Murambi, Jean-Baptiste Gatete.

Bien que le nombre de viols commis en 1994 soit estimé à plusieurs milliers, au moment où nous écrivions le TPIR n'avait inculpé que deux accusés pour crimes de violence sexuelle dont l'un a vu sa peine modifiée en appel. Les crimes de violence sexuelle étaient par ailleurs mentionnés dans dix-neuf des inculpations en cours.

L'Union Européenne
Les représentants de l'UE ont rencontré le Ministre rwandais des affaires étrangères en février pour lui faire part de leurs préoccupations concernant les restrictions à la liberté de la presse et à la liberté d'association, puis de nouveau en avril après l'arrestation de Pasteur Bizimungu. En septembre, les représentants de l'UE ont protesté contre un plan visant à imposer à 40 % les salaires des expatriés travaillant pour des ONG internationales, y voyant potentiellement une entrave à leur travail. L'UE a versé 155 millions de dollars d'assistance au Rwanda, l'un des vingt-huit pays retenus pour son Initiative européenne en faveur de la démocratie et des droits de l'homme et a accordé 4 millions de dollars supplémentaires aux ONG locales et internationales, ainsi que 1,28 millions de dollars à la Commission nationale des droits de l'homme pour l'observation des gacaca. Elle a également donné 475.000 dollars pour la reconstruction de la Cour Suprême du Rwanda afin de permettre au TPIR de siéger à Kigali.

Le Royaume-Uni a continué d'apporter un appui solide, financier et politique, au Gouvernement rwandais en lui fournissant environ 50 millions de dollars, dont les deux tiers en aide budgétaire et un tiers en assistance technique. Il a fait peu d'efforts pour aider la société civile et la liberté de la presseou pour soutenir l'indépendance des gacaca. En octobre 2001, le Gouvernement néerlandais a cherché à faire du Rwanda un bénéficiaire privilégié de son aide mais, face à l'opposition déterminée du Parlement et de l'opposition nationale, il a opté pour le compromis en garantissant un statut spécial au Rwanda mais avec certaines limites: pas d'aide importante au budget et obligation de remplir certaines conditions sur la démocratisation et les droits humains. Les Pays-Bas ont débloqué 19 millions de dollars en aides, parmi lesquelles assistance budgétaire et technique à deux provinces fer-de-lance de la décentralisation et accordé son soutien politique et financier aux organisations de défense des droits humains et à la presse.

La Belgique a été le seul donateur important aux gacaca avec 4,75 millions de dollars alloués au Gouvernement et aux ONG, sur un total de 17 millions de dollars. La Belgique a également coordonné la réponse diplomatique et celle des donateurs à la création des gacaca.

Les Etats-Unis
L'administration américaine a exercé une sérieuse pression diplomatique et financière sur le Gouvernement rwandais pour qu'il se retire de RDC et ces efforts ont culminé avec la rencontre des Présidents George Bush et Paul Kagamé en septembre. Lors de la crise entre le Gouvernement rwandais et le TPIR, les Etats-Unis ont fait pression sur le Rwanda pour qu'il autorise les témoins à voyager afin que les procès puissent reprendre, mais il n'a pas assez clairement réclamé d'enquêtes sur les crimes qu'auraient commis les FDR. Lors de la réunion du Fonds monétaire international en juin, les Etats-Unis ont refusé d'approuver le financement de l'aide à la réduction de la pauvreté et à la croissance au Rwanda, une manière de marquer leur réprobation sur les violations des droits humains commises par les Rwandais en RDC. Le rapport sur les droits humains du Département d'Etat américain a critiqué le bilan médiocre du Rwanda en 2001, s'attirant en retour une vive réaction du Gouvernement rwandais. L'Agence américaine pour l'aide internationale (USAID) a accordé 32 millions de dollars d'assistance.

Rapport de Human Rights Watch sur la question
Rwanda: Observing the Rules of War?
Juin 2001