Africa - West

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VII. DES ENFANTS DANS LES RUES

Sept mille d'enfants, selon les estimations, parmi les plus vulnérables du Rwanda, ont gagné les rues de Kigali et des capitales provinciales pour échapper aux sévices décrits au chapitre précédent et dans l'espoir d'y trouver une vie meilleure. Appelés mayibobo en kinyarwanda, ces enfants ont été diabolisés et marginalisés par les citadins. Ils luttent pour trouver de quoi survivre et échapper à la fureur des forces de l'ordre ou des particuliers en colère qui les traitent comme une nuisance. A voir les visages souvent sales de ces bandes d'enfants qui commettent de petits larcins, il est facile pour les habitants des villes d'oublier qu'il ne s'agit que d'enfants.

L'UNICEF et l'archidiocèse de Kigali ont chacun publié ces dernières années des études sur le sort des enfants des rues au Rwanda. Elles ont montré qu'environ un tiers de ces enfants se prétendaient orphelins de leurs deux parents et un tiers d'entre eux déclaraient avoir perdu un des deux parents. Peu avaient reçu plus de trois années d'enseignement primaire. Nombre de ces enfants avaient été séparés de leur parents pendant ou après le génocide et avaient vécu dans les centres pour mineurs non accompagnés. Des problèmes familiaux comme les sévices, l'alcoolisme ou des beaux-parents qui les ont chassés de la maison par peur de les voir un jour réclamer des biens destinés à leurs demi-frères et s_urs, sont également des facteurs importants qui amènent les enfants dans les rues. Mais d'autres ont simplement tenté d'échapper à la misère extrême dans laquelle ils vivaient dans les collines et espéré trouver un travail en ville.135

Les chercheurs de Human Rights Watch ont interrogé plus d'une centaine d'enfants des rues pour ce rapport, dans la rue même ou dans les centres ayant des programmes à leur intention. Beaucoup de ceux qui ont été interrogés étaient privés de leur propriété dans leur région d'origine: s'ils possédaient une propriété, elle était souvent occupée par d'autres. Pratiquement tous avaient été exploités dans leur travail et aucun n'avait achevé l'école primaire. L'insécurité dans laquelle ils ont grandi a également prélevé sa dîme sur ces enfants. Aussi, malheureusement mais sans surprise, un enfant avec qui un chercheur de Human Rights Watch a parlé qui semblait à peine adolescent avait en réalité dix-sept ans. Sa croissance avait été entravée par la malnutrition.136

La vie dans la rue

Bien que de nombreux enfants aient assuré préférer la vie dans les rues à celle sur les collines, leur survie y est tout sauf facile. Ils sont mal nourris, en mauvaise santé, sales et n'ont que leurs hardes sur le dos. Même si le Centre Hospitalier de Kigali, le CHK, les soigne gratuitement, de nombreux enfants des rues ne le savent pas et n'accèdent que rarement aux soins médicaux. Les enfants ont fréquemment recours à la drogue pour tromper la faim, le froid et les difficultés de la vie dans les rues, fument de la marijuana, respirent de la colle ou les émanations de gaz. Ils n'ont pratiquement aucun accès à l'éducation. Comme on leur demandait dans le cadre d'une étude ce que signifiait pour eux le mot mayibobo, des citadins ont répondu qu'il se rapportait à des enfants crasseux, agressifs, criminels, indisciplinés et drogués.137

En réalité, seule une minorité de ces enfants dort dans les rues, parfois sur les pas de portes, dans des poubelles remplies de charbon à vendre ou à l'air libre, dans des cartons. Les autres, pour la plupart, trouvent des lieux où passer la nuit avec des gardiens de nuit, dans des familles où ils servent comme domestiques peu ou pas payés, ou encore avec des adultes qui leur donnent un endroit pour dormir à condition qu'ils rapportent chaque jour de l'argent ou de la nourriture. Louise N., qui s'est retrouvée à la rue à l'âge de treize ans, s'est considérée comme chanceuse quand une vieille femme l'a autorisée à passer les nuits dans sa maison de Kimisagara, un quartier de Kigali. Mais si Louise N. ne gagnait pas assez d'argent en portant des paquets au marché, la femme la jetait dehors la nuit tombée. Louise N. a expliqué que la vie est particulièrement dure pour les filles qui cherchent un lieu où dormir. « C'est dangereux de dormir comme çà, n'importe où », a-t-elle déclaré.138

Une étude effectuée en 2002 par l'Université Johns Hopkins sur la vie sexuelle des enfants des rues a montré que ces enfants étaient extrêmement vulnérables aux abus sexuels et aux maladies sexuellement transmissibles. Plus de la moitié des garçons et plus des trois quarts des filles, dont 35 % âgées de moins de dix ans, ont déclaré avoir une vie sexuelle. Soixante-trois pour cent des garçons ont reconnu avoir forcé une fille à avoir une relation sexuelle avec eux. Quatre-vingt treize pour cent des filles ont rapporté avoir été violées. Un tiers des garçons et huit pour cent des filles savaient comment se procurer un préservatif, mais seule une poignée d'entre eux disaient en avoir utilisé tout le temps ou la plupart du temps pendant l'année écoulée. Ils avaient eu de deux à trois partenaires au cours des six derniers mois. La plupart avaient quelques notions sur le VIH/SIDA, mais ne savaient pratiquement rien des autres maladies sexuellement transmissibles. Quatre-vingt dix-huit pour-cent des filles et soixante douze pour-cent des garçons connaissaient quelqu'un vivant avec le VIH ou qui était mort du SIDA. Les deux tiers des enfants interrogés n'avaient jamais fréquenté l'école. 139

Quelque quarante-cinq pour-cent des enfants interrogés pour l'étude menée par l'Archidiocèse se sont déclarés âgés de seize ans au moins.140 Seulement dix-neuf pour- cent d'entre eux étaient porteurs de la carte d'identité obligatoire. D'autres se sont plaints que le processus d'obtention était trop compliqué et trop long, ou ont expliqué qu'ils ne voulaient pas rentrer dans leur localité d'origine pour déposer leur demande de carte.141 Des travailleurs sociaux et des juristes dans des centres pour enfants des rues ont tenté de les aider à obtenir leurs cartes d'identité mais se sont trouvés bloqués par le manque de documents et, parfois, par le manque de coopération des autorités locales.142

Les services assurés par les enfants des rues constituent une part importante de l'économie informelle. Par exemple, des citadins, qui par ailleurs froncent le nez à la vue des enfants des rues, les paient régulièrement pour porter leurs achats au marché ou garder leur voiture en ville. Les enfants collectent également les poubelles et font un petit commerce de cigarettes, de bonbons, d'_ufs durs, de cacahuètes et autres. Des employeurs font souvent appel à eux pour des travaux dangereux et mal payés. A Butare, les assistants sociaux se plaignent que les enfants soient utilisés pour servir d'intermédiaires entre les hommes de la ville et les prostituées en échange d'une petite commission.143 Leur « emploi » peut s'avérer très précaire : si un enfant tombe malade ou si un policier confisque sa marchandise, il ne peut rien faire. Benjamin U. a considéré qu'il avait de la chance quand une femme l'a employé comme serviteur chez elle. Mais quand il a entamé sa formation de mécanicien, plusieurs heures par jour, elle l'a jeté dehors et il s'est retrouvé à vivre de nouveau dans la rue.144

Les enfants des rues commettent fréquemment de petits larcins pour assurer leur survie. Mais contrairement à une idée reçue, ils sont rarement mêlés à des faits plus graves. Certains enfants plus âgés et jeunes adultes ont commis des crimes plus sérieux comme le viol. Toutefois, les travailleurs sociaux internationaux qui travaillent avec les enfants en prison ont confirmé que la plupart des enfants emprisonnés pour viols vivaient auparavant avec leurs familles et non pas dans la rue.145 A Kigali, les enfants « cassent » fréquemment les voitures pour voler les triangles de signalisation, exigés par la loi de tout propriétaire de véhicule, afin de les revendre aux automobilistes 1.500 Francs rwandais (environ trois dollars US). Une assistante sociale de Butare a remarqué que le plus souvent, elle voyait des enfants poursuivis pour avoir volé des avocats ou des bananes.146

Dans les villes les plus importantes, il existe des centres non-gouvernementaux pour les enfants des rues. Ces centres, distincts des centres pour mineurs non accompagnés, fournissent un certain nombre de services aux enfants qui les fréquentent dont l'instruction et/ou la formation à un métier, le conseil, la nourriture et les soins médicaux. L'UNICEF et l'Union européenne assurent le financement de certaines activités de ces centres. Nombre d'entre eux sont affiliés à l'Eglise catholique. L'Archidiocèse de Kigali, qui soutient quatre centres, a _uvré pour coordonner les efforts, mener une étude et défendre les enfants des rues. Il emploie également un juriste à plein temps pour aider les enfants dans ses quatre centres à démêler leurs problèmes juridiques qui concernent essentiellement les droits de propriété. Les autres centres d'accueil manquent de moyens pour apporter une assistance judiciaire aux enfants avec lesquels ils travaillent.

La directrice du Centre Intiganda, à Butare, a indiqué que son centre visait généralement à préparer le retour dans les six mois des enfants dans leur famille sur les collines, mais que ceci était rarement possible. Souvent, a-t-elle expliqué, il peut falloir jusqu'à deux ans à un enfant perturbé pour se sentir prêt à regagner les collines ou au centre pour trouver une famille d'accueil qui convienne. Dans de nombreux cas, a-t-elle poursuivi, les structures familiales que l'enfant a laissées derrière lui n'ont pas les moyens de le réintégrer.147 Quand le père de Jean-Pierre M. est mort, sa mère a été chassée par l'oncle paternel de l'enfant. L'oncle a ostensiblement autorisé le garçon à rester dans sa maison mais a pris le contrôle des terres cultivables de la famille. Jean-Pierre M. n'avait que douze ans et ne pouvait vivre seul dans une maison sans aucun moyen de subsistance, alors il a rejoint la rue. Des assistants sociaux ont raconté à Human Rights Watch qu'ils avaient plus tard tenté de réunir l'enfant avec sa mère. Mais après quelques temps, son beau-père l'a jeté dehors, menaçant de s'en prendre à la mère si le garçon ne partait pas. Alors Jean-Pierre M. est revenu au centre pour enfants des rues. Un assistant social qui avait rendu visite à la mère après le retour du garçon au centre a indiqué qu'elle avait confirmé sa version des faits.148 Une assistante sociale de Butare a rendu visite à la famille de Joseph K., dans la même province, pour préparer son retour à la maison. Elle a abandonné et reconnu qu'il n'avait nulle part où aller quand elle a vu que la mère de l'enfant et ses frères et s_urs vivaient dans un tout petit abri et qu'il n'y avait à proprement parler aucune place pour lui dans la maison familiale.149

Parfois, le gouvernement a fait preuve d'hostilité envers les centres pour enfants. Selon un avocat des enfants des rues, les autorités les ont accusés d'attirer indirectement davantage d'enfants dans les rues en leur apportant de l'aide.150 La directrice de l'un de ces centres a déclaré à un chercheur de Human Rights Watch que les autorités l'avaient sanctionnée parce qu'elle gardait les enfants trop longtemps. « Si vous les gardez si longtemps, ça encourage d'autres enfants à venir en ville, à rejoindre la rue, » l'a accusée un responsable municipal. « Cela ne fait qu'aggraver le problème. »151 Ironie du sort, quand les autorités de Kigali ont fait l'objet de pressions croissantes après avoir commencé les rafles de juin 2001, évoquées plus bas, le maire-adjoint a déclaré à Human Rights Watch que la ville avait demandé aux centres de faire davantage et de prendre soin d'un plus grand nombre d'enfants. Toutefois, la ville n'avait pas assuré une augmentation en conséquence des ressources des centres pour les aider à faire face à l'afflux de nouveaux pensionnaires. Et le responsable a également fait valoir que la ville ne cautionnait pas le travail effectué par les centres de jour, qui fournissent des programmes éducatifs, mais n'offrent pas de pension aux enfants.152

La violence de la police
Les officiers de police et les membres des Forces de Défense locale semblent généralement entretenir des relations conflictuelles avec les enfants des rues. Francis R., dix-neuf ans au moment de son entretien avec Human Rights Watch, a vécu dans la rue depuis la guerre. Interrogé sur ses relations avec les agents des forces de l'ordre, il a répondu : « Je vais vous dire, on est comme des ordures dans les rues. Tout le monde le voit. Alors [les agents] ne nous parlent pas. »153 Et les enfants, en retour, voient les agents des forces de l'ordre comme des prédateurs prêts à les frapper, à leur confisquer leurs affaires ou à les emmener de force. Malheureusement, il n'était pas rare pour des passants, en 2000, de voir un membre des Forces de Défense locale, apparemment sans aucun provocation préalable à son encontre, ramasser un enfant et lui flanquer des coups de genoux. Un des témoins a rapporté à Human Rights Watch avoir vu ensuite le membre des Forces de Défense locale jeter l'enfant à terre et s'éloigner malgré les cris de douleur du garçon.154

Des particuliers en colère se sont parfois sentis habilités à appliquer eux-mêmes la loi, appréhendant et frappant les enfants qu'ils soupçonnaient d'avoir volé. A Butare, un commerçant a battu un garçon à mort en décembre 2000. Il le soupçonnait d'avoir volé. Le meurtrier aurait été ensuite arrêté.155 En juin 2000, un soldat de l'APR a abattu un enfant des rues sur le marché grouillant de Gisenyi, soi-disant parce que l'adolescent avait heurté un étal de tomates appartenant à l'épouse du soldat. Selon les témoins, d'autres enfants des rues, rendus furieux par le meurtre, ont commencé à lancer des pierres. La police locale a ensuite arrêté dix-sept enfants afin de rétablir l'ordre et les a détenus pour la nuit au poste de police de Gisenyi. Quand un chercheur de Human Rights Watch s'est rendu au poste de police le lendemain matin, le commandant présent a assuré que le soldat avait été arrêté et que les dix-sept enfants seraient libérés dans la journée.156

Un garçon de seize ans, James D. originaire de Kibungo, a confié aux chercheurs de Human Rights Watch qu'il se sentait terrorisé face aux membres des Forces de Défense locale et à d'autres enfants des rues plus âgés qui le battaient fréquemment. Mais il a ajouté n'avoir personne vers qui se tourner, nulle part où porter plainte.157 Selon un travailleur humanitaire étranger, des efforts ont été déployés pour former la police nationale à mieux protéger les droits des enfants. Mais ce dernier a été consterné de voir que la police avait régulièrement refusé de fournir à la communauté internationale la moindre information, rendant difficile la surveillance des droits des enfants.158 Il faut trouver le moyen de remédier à cette hostilité qui existe entre les enfants des rues et les forces de l'ordre: la police devrait traiter les enfants comme tels; les enfants devraient être éduqués et la police devrait montrer, dans la pratique, qu'elle est là pour protéger tous les citoyens, y compris les enfants des rues.

Nettoyer les rues 
Le Gouvernement rwandais a lancé sa dernière rafle des enfants des rues en juin 2002. En novembre, les membres des Forces de Défense locale, agissant sur ordre du Ministère du gouvernement local, continuaient de ramasser les enfants, de force et contre leur gré. La plupart des enfants ont été emmenés à Gitagata où les agents humanitaires ont exprimé leurs préoccupations sur leur sort. En août, Gitagata accueillait deux fois plus d'enfants que les 500 que sa capacité permet. Les problèmes les plus pressants à Gitagata concernent le manque d'eau potable, l'absence d'enregistrement ou de documents sur les enfants, la violence physique et sexuelle, la présence de forces de sécurité dans le camp et l'absence de programmes structurés pour les enfants. Quand un chercheur de Human Rights Watch s'y est rendu en septembre, un couple était venu de Kigali pour rechercher son fils disparu six semaines auparavant sur le marché de la capitale ; l'administrateur du camp a refusé de laisser partir le garçon sans une lettre du conseiller de secteur de Kigali. De nombreux enfants ont tenté de s'échapper ; les Forces de Défense locale ont tiré sur l'un d'eux et d'autres ont été détenus dans la prison voisine de Nyamata. Certains sont retournés à Kigali pour être de nouveau raflés et renvoyés à Gitagata. En novembre, le gouvernement n'avait pas encore mis au point de politique globale pour résoudre le problème.159

La dernière fois que le gouvernement avait tenté de « nettoyer » les rues remontait à l'année précédente. Le 19 juin 2001, le maire de Kigali a commencé à mettre en oeuvre un plan de regroupement systématique des enfants des rues afin d'en débarrasser, une bonne fois pour toutes, les artères de la capitale. Dans les semaines qui suivirent, les autorités locales arrêtèrent quelque 1.300 enfants des rues.160 Face aux critiques croissantes des représentants de la communauté internationale à Kigali, la ville transféra la plupart des enfants vers des centres de réhabilitation non-gouvernementaux après les avoir gardés en prison quelques jours ou quelques semaines. Beaucoup se sont échappés et ont regagné les rues dès qu'ils ont pensé qu'elles étaient de nouveau sûres.

Le maire-adjoint chargé des questions relatives à la jeunesse a expliqué à Human Rights Watch que la Commission exécutive de la Ville de Kigali s'était réunie en mai 2001 et avait décidé de s'attaquer au problème des enfants des rues par tous les moyens nécessaires. Il a indiqué que les autorités de la capitale considéraient qu'elles étaient la seule et illimitée autorité habilitée à agir ainsi en vertu du récent programme de décentralisation. Le maire-adjoint a ajouté que Kigali serait ravi que les préfets et le gouvernement du pays décident de collaborer à cet effort, mais que la ville continuerait qu'ils le veuillent ou non.161

A deux reprises en juin 2001, peu après que les autorités de la Ville de Kigali eurent commencé leurs rafles systématiques d'enfants des rues, l'Assemblée nationale de transition a sommé le Ministre du gouvernement local, Désiré Nyandwi, d'expliquer ce que le gouvernement entendait faire pour résoudre le problème de ces enfants.162 Mais son adjointe, la Secrétaire d'Etat Odette Nyiralirimo, a déclaré à Human Rights Watch que ni le gouvernement central ni les gouverneurs des autres provinces n'avaient été informés de l'initiative de Kigali et qu'ils n'y avaient pris aucune part.163 Elle n'a pas précisé si le Ministère du gouvernement local avait une part dans des rafles similaires perpétrées le même mois à Butare et à Kibuye.164

Pendant plusieurs semaines, des membres des Forces de Défense locale à Kigali agissant sur instruction du maire de Kigali ont systématiquement ramassé les enfants de force pour les emmener aux postes de police locaux et dans d'autres cachots de la capitale. Evidemment, les enfants ont résisté à ces regroupements ce qui a induit le recours à la force physique à leur encontre, notamment aux coups. Certaines de ces rafles ont été conduites en plein jour, à la vue des habitants de Kigali. Plusieurs témoins ont raconté qu'ils avaient vu des enfants conduits dans des camions pick-up, tenus en joue par des Forces de Défense locale.165 D'autres enfants ont dû marcher jusqu'aux centres de détention où ils étaient rassemblés. Un garçon de treize ans a déclaré à Human Rights Watch que des membres des Forces de Défense locale l'avaient réveillé dans la voiture abandonnée dans laquelle il dormait habituellement, dans le quartier de Nyamirambo : ils l'ont attaché avec une cinquantaine d'autres enfants en utilisant des tee-shirts et autres vêtements pour les accrocher par le bras les uns aux autres, puis ils les ont fait marcher en file indienne à travers la ville jusqu'au poste de police de Muhima. Des membres des Forces de Défense locale, dont certains étaient armés, les ont escortés jusqu'à Muhima en les tapant et en les menaçant, de peur qu'ils essaient de s'échapper.166

Une nuit, à minuit, environ une semaine après le début des rafles, des membres des Forces de Défense locale ont trouvé deux enfants endormis qui s'étaient échappés à la suite d'une précédente rafle. Les garçons ont dit à un chercheur de Human Rights Watch que les agents des forces de l'ordre les avaient jetés dans un camion rempli jusqu'aux chevilles de nourriture avariée et d'asticots et les avaient ainsi conduits jusqu'à un bureau du district où ils ont passé la nuit enfermés. Au bureau du district, des membres des Forces de Défense locale les ont battus. Le lendemain, ils ont été emmenés au poste de Muhima.167

Le 26 juin, la Secrétaire d'Etat du Ministère du gouvernement local et des affaires sociales indiquait qu'à cette date, 700 enfants avaient été ramassés au total. Elle ne savait toutefois pas qu'une nouvelle rafle avait eu lieu tôt, le matin même, à Nyamirambo.168 A une heure du matin, ce jour-là, Antoine K. a observé, caché dans l'encoignure d'une porte, une cinquantaine de membres des Forces de Défense locale qui réveillaient les enfants endormis dans les rues et les obligeaient à monter dans des camions. La rafle n'a pas été particulièrement violente, a souligné le témoin, dans la mesure où seuls ceux qui tentaient de s'échapper étaient battus. Deux heures plus tard, il a vu ceux qui avaient été pris emmenés dans un grand camion et, d'après ses estimations, ils étaient environ trois cents.169 L'assistant social qui a raconté cette histoire a expliqué que les enfants des rues parlaient souvent de leur peur d'être envoyés sur l'île d'Iwawa, sur le lac Kivu. Les chercheurs de Human Rights Watch ont reçu des informations non confirmées selon lesquelles des enfants avaient été emmenés là-bas en 1998.170 L'assistant social a ajouté qu'Antoine K., né en exil en Ouganda, avait été lui-même un kadogo, un enfant soldat, dans les rangs du FPR.171

Dans certains cas, les Forces de Défense locale ont raflé tous les enfants qui leur semblaient vivre dans la rue, y compris des enfants qui vivaient avec leurs familles. Un jeune garçon du quartier de Gikondo, à Kigali, a raconté qu'il se rendait au marché vers huit heures du matin pour y faire les courses de sa mère; ensuite, la seule chose dont il se souvienne est qu'un membre des Forces de Défense locale l'a attrapé, l'a envoyé en prison puis quelques jours plus tard dans un centre de réhabilitation. Dans ce centre, il a dit que ses parents lui manquaient et qu'il était inquiet parce qu'ils n'avaient aucune idée de l'endroit où il se trouvait.172

Pendant les rafles de juin à Kigali, la plupart des enfants étaient d'abord emmenés au poste de police de Muhima. Sur place, plusieurs centaines à la fois étaient détenus pour des périodes allant d'une journée à une semaine. Le maire-adjoint a déclaré que les enfants n'étaient accusés d'aucun crime.173 Un chercheur de Human Rights Watch a interrogé des assistants sociaux et trois enfants choisis au hasard parmi un groupe de 111 enfants arrivés dans un centre de réhabilitation deux jours auparavant : tous les trois ont fait état de mauvais traitements au poste de Muhima. Ils ont indiqué que la police ne leur avait donné à manger que tous les deux ou trois jours. Apparemment, la police a également harcelés les enfants en les battant quand ils cherchaient à approcher d'une source d'eau pour boire. Certains dormaient à même le sol, dans la cellule bondée, tandis que d'autres auraient passé leur nuit en plein air. Un garçon de treize ans a rapporté que la police l'avait battu avec la crosse d'un fusil, le blessant à la cheville. Elle est restée enflée pendant trois jours puis avait commencé à guérir, a-t-il ajouté.174 Un autre, âgé de douze ans, a expliqué à Human Rights Watch que la police utilisait des bâtons pour frapper les enfants derrière les cuisses. « Ils battaient surtout ceux qui essayaient de s'échapper », a-t-il souligné. « Mais ils nous refusaient de l'eau (au poste de police). On n'a pas bu pendant un moment. Quand on s'approchait pour prendre de l'eau, ils nous battaient. »175 Cependant, un autre enfant, également âgé de douze ans, a déclaré que la police jetait des pierres sur eux, au poste, qu'elle avait touché un enfant à la tête et un autre aux yeux.176 Human Rights Watch n'a pas eu connaissance de cas où des enfants auraient été sérieusement blessés pendant qu'ils étaient gardés à vue.

La police nationale a nié que des enfants aient été battus pendant leur garde à vue. Confronté à des cas précis dans lesquels des enfants avaient été battus lors des rafles ou à Muhima, Damas Gatare, chargé des droits humains et des relations avec la population au sein de la police nationale, a déclaré à Human Rights Watch que la police n'était pas responsable des actes commis par des membres des Forces de Défense locale.177 Le maire-adjoint de Kigali, qui supervise les Forces de Défense locale et qui a ordonné les rafles, n'a sanctionné aucun membre de ces Forces pour avoir battu des enfants.178

Ceux qui se souciaient du bien-être des enfants n'ont pas été en mesure de surveiller le respect de leurs droits humains pendant les rafles. Des représentants de l'UNICEF et d'organisations non gouvernementales, locales et internationales, ont tous rapporté aux chercheurs de Human Rights Watch que les policiers au poste de Muhima leur avaient refusé la permission de voir les enfants en détention, arguant du fait que la Police nationale ne faisait que garder les enfants au nom de la Ville. Ils leur ont expliqué que seules les autorités municipales pouvaient les autoriser à rendre visite aux détenus.179 Le temps qu'un chercheur de Human Rights Watch obtienne une entrevue avec le maire-adjoint, la plupart des enfants avaient déjà été envoyés de Muhima vers les centres de réhabilitation. Le responsable a nié avoir refusé aux observateurs la permission d'accéder aux enfants en détention.180 Toutefois, des enfants des rues auraient été détenus à Muhima jusqu'à la fin 2001, même si les rafles étaient alors devenues moins fréquentes et moins brutales. Mais les représentants de l'UNICEF n'avaient toujours pas été autorisés à accéder aux locaux du poste de police. 181

Ensuite, Human Rights Watch n'a pas pu obtenir d'informations sur les enfants regroupés ni sur le lieu où ils avaient été emmenés. Les enfants ont indiqué que la police n'avait pas enregistré leurs noms. Tous les enfants n'ont pas été emmenés à Muhima ; certains ont dit qu'ils avaient été conduits dans des bureaux du district ou du secteur. Les personnels des ONG et de l'UNICEF ont expliqué qu'ils n'étaient pas sûrs du nombre d'enfants qui avaient été détenus dans ces conditions, ni de quand et où ils avaient été déplacés.182

Les autorités de Kigali ont déclaré qu'elles avaient transporté tous les enfants des rues qui disaient venir d'ailleurs vers leur province d'origine, revendiquant la seule responsabilité des enfants de la capitale. Elles n'ont pas consulté les gouverneurs provinciaux avant d'agir. Aussi les provinces étaient-elles mal préparées à recevoir ces enfants.183 Un chercheur de Human Rights Watch a rendu visite aux enfants qui avaient été envoyés à Gitarama. Un centre géré par l'Eglise qui accueillait déjà les enfants des rues locaux a été obligé de recevoir les nouveaux arrivants mais les employés se plaignaient de ne pas avoir été avertis auparavant et de ne pas avoir reçu de moyens supplémentaires.184 Un chercheur qui visitait Butare n'a pas été en mesure de déterminer où les enfants originaires de la province de Butare avaient été envoyés. Les employés des centres accueillant des enfants des rues sur place ont assuré n'avoir reçu aucun des enfants raflés à Kigali. 185

Dans un tel climat de confusion, des acteurs de la protection de l'enfance déplorent qu'aucun garde-fou n'ait pu empêcher certains opportunistes de ramasser des enfants pour leur propre compte. Selon un agent humanitaire international, un groupe d'enfants âgés de seize ans et plus, qui n'avaient pas leur carte d'identité obligatoire, ont été emmenés en camion vers le quartier de Kicukiro à Kigali et, de là, vers un lieu inconnu. Ses tentatives pour retrouver leurs traces sont restées vaines.186 Les rebelles hutus avaient attaqué le nord-ouest du Rwanda quelques semaines avant le début des rafles et la guerre au Congo voisin s'était récemment intensifiée. Ceci a fait craindre que certains enfants plus âgés raflés dans les rues aient été recrutés à des fins militaires. Le personnel de deux ONG internationales a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch avoir reçu des informations crédibles selon lesquelles, dans certains cas isolés, des enfants des rues avaient en fait été recrutés par l'armée à la faveur des rafles.187

Le maire adjoint de Kigali a indiqué à Human Rights Watch que l'objectif de ces rafles n'était pas de violer les droits des enfants mais au contraire de protéger les enfants en les soustrayant aux dangers de la vie dans les rues.188 Après une brève période de détention, les autorités ont en fait envoyé les enfants originaires de Kigali vers des centres déjà existants qui accueillent des enfants des rues, comme le Projet Rafiki dans le district de Butamwa. Quand un chercheur de Human Rights Watch leur a rendu visite à Butamwa, les enfants avaient de quoi manger, des vêtements neufs et un endroit pour dormir. Ils avaient tous l'air tristes et perdus.189 Deux semaines plus tard cependant, une fois l'attention internationale détournée, les assistants sociaux se sont plaints que le Projet Rafiki manquait de financement et pouvait à peine acheter de la nourriture en quantité suffisante pour les enfants.

L'UNICEF était réticente à soutenir l'action du gouvernement en s'occupant de ces enfants rassemblés de force dans la mesure où ces rafles contrevenaient à la Convention relative aux droits de l'enfant qui interdit l'arrestation et la détention arbitraires.190 Tout en reconnaissant que les enfants se portent généralement mieux dans des centres que dans la rue, l'UNICEF ne voulait pas entériner ainsi les méthodes de la ville. L'UNICEF et plusieurs ONG locales et internationales ont tenté à la place d'engager un dialogue avec le Ministère du gouvernement local et les autorités municipales afin de développer un plan d'aide aux enfants des rues qui ne violerait pas leurs droits. Lors d'une réunion à Kigali le 26 juillet, tous les participants - y compris des représentants de la Ville de Kigali, du Ministère du gouvernement local, des gouvernements provinciaux, de l'UNICEF et des ONG - se sont mis d'accord sur un plan d'action et sur la fin des regroupements forcés. L'un des auteurs du plan d'action a indiqué que les participants avaient été consternés quand les autorités de la ville avaient repris leurs rafles dans les jours suivant la réunion.191

Malgré tout, l'UNICEF n'a pas dénoncé ces rafles ni les mauvais traitements infligés aux enfants par la police. Plusieurs sources proches de l'agence des Nations Unies ont avoué à Human Rights Watch que l'organisation était extrêmement réticente à faire pression sur le gouvernement afin qu'il cesse ces rafles, de crainte de braquer les autorités. Le maire-adjoint et les représentants du Ministère du gouvernement local ont intimidé le personnel de l'UNICEF et accusé l'organisation d'attenter à la souveraineté du Rwanda alors qu'elle s'était gardée d'intervenir pour mettre un terme au génocide en 1994.192 Le gouvernement avait déjà menacé d'expulser les employés de l'UNICEF et de « ruiner leurs carrières » pour s'être exprimés sur cette question par le passé, notamment quand l'UNICEF avait écrit une lettre dans laquelle elle dénonçait de précédentes rafles en février 2000.193

Les précédentes rafles
Le gouvernement a régulièrement tenté par ses rafles de régler le problème croissant des enfants des rues depuis 1997. Toutes ces rafles ont été menées en violation de la Convention relative aux droits de l'enfant dans la mesure où elles ont conduit à des arrestations arbitraires et à une période de détention.194 Il semble que le seul aspect de l'opération auquel on ait vraiment réfléchi ait été l'action policière pour regrouper les enfants. Les responsables n'ont pas assez insisté sur la nécessité de réhabiliter ces enfants, ni de s'attaquer aux causes qui les ont amenés dans la rue. Les rafles répétées n'ont cependant pas réussi à réduire le nombre d'enfants vivant dans les rues des villes, ni à améliorer leur sort.

En avril 1997, le gouvernement et les militaires ont ramassé plus de 1.600 enfants dans les rues et les ont envoyés dans un centre à Shyorongi, commune de Kigali rural. Le Ministère de la jeunesse, de la culture et des sports a, semble-t-il, réparti les enfants par âge et a envoyé ceux de plus de treize ans dans des « camps de solidarité », où ils ont suivi une formation sur l'idéologie politique et sur l'ethnicité en compagnie de réfugiés de retour au pays. Plus de trois cents, plus jeunes, sont restés à Shyorongi, dans de mauvaises conditions de séjour et pratiquement sans assistance.195 Beaucoup se sont échappés et ont regagné Kigali en quelques jours. Francis R. a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch qu'une barrière entourait le camp qui, bien qu'en fils de fer barbelés, n'était pas solide, ce qui facilitait l'évasion. Il a ajouté qu'ils sautaient par-dessus la clôture et couraient tout le trajet jusqu'à Kigali. « Il y avait trois classes », a-t-il expliqué, « ainsi pouvaient-ils dire qu'on étudiait. Mais comment aurait-on pu étudier sans rien à manger ? »196 Les enfants des rues utilisent le mot « marathon » pour décrire leur évasion des postes de police parce qu'ils doivent courir loin et très vite. Et si courir un « marathon » peut s'avérer extrêmement difficile après avoir été battu, un enfant a fait valoir aux chercheurs de Human Rights Watch que ça vaut la peine de se faire mal en courant pour éviter d'être soumis à pires douleurs plus tard.197

En 1998, le gouvernement a mené un autre regroupement massif et forcé, cette fois en emmenant les enfants dans un centre de la commune de Musebeya, dans la Préfecture de Gikongoro. Gilbert S., un orphelin qui avait l'habitude de rester chez le directeur d'une ONG locale à Kigali, a été attrapé à cette période. Son précédent tuteur a déclaré qu'il n'avait jamais revu le garçon.198 Bien que le centre de Musebeya ait été officiellement chargé d'assurer l'instruction des enfants, il n'offrait en fait aucun programme et les enfants avaient peu d'accès aux services de base. Après avoir quitté Gikongoro, certains ont dû être hospitalisés pour des maladies contractées dans cet établissement.199 Les camps de Shyorongi et de Gikongoro n'étaient pas bien surveillés. Un agent humanitaire étranger qui a mené des recherches sur les questions relatives aux enfants a ensuite rapporté à Human Rights Watch qu'il aurait été facile pour des centaines d'entre eux de disparaître. Il estimait que 1.200 à 1.400 enfants avaient été regroupés de force et amenés à Gikongoro en novembre 1998. Environ 400 d'entre eux se sont échappés et sont retournés dans les rues de Kigali en l'espace d'une semaine. D'autres ont regagné les rues un peu plus tard ou sont finalement rentrés dans leurs familles, mais il n'était pas en mesure de tenir le compte pour tous les enfants qui avaient été raflés.200 Comme on lui demandait en quoi les rafles de 2001 à Kigali différaient de celles menées auparavant à Shyorongi ou Gikongoro, le Dr Odette Nyiralirimo, Secrétaire d'Etat du Ministère du gouvernement local et des affaires sociales, a expliqué à Human Rights Watch qu'en 2001, les responsables avaient séparé les enfants de Kigali de ceux venus des autres provinces.201

Plusieurs enfants qui avaient séjourné dans les camps de Shyorongi et de Gikongoro ont indiqué à Human Rights Watch qu'ils pensaient avoir vu des soldats recruter pour le service militaire. Rochelle S., une fille de Kigali âgée de treize ans, a témoigné que les soldats l'ont emmenée avec cinq autres enfants, dont quatre qu'elle a nommés, jusqu'à un endroit où de nombreux autres enfants avaient été réunis dans la forêt, sur les bords d'une pièce d'eau. Là, les enfants étaient battus et on leur disait qu'ils allaient être emmenés sur une île pour rejoindre l'armée. Elle n'a pas été capable de préciser quand ceci a eu lieu. Rochelle S. et trois autres ont réussi à s'échapper et ont couru leur « marathon » pour regagner Kigali.202

En juillet 1999, les gendarmes203 de Kigali ont mené de violents regroupements d'enfants des rues qu'ils ont détenus dans des conteneurs dans le quartier de Remera. Les enfants ont raconté plus tard à des assistants sociaux qu'ils avaient eu très peu à manger et à boire et ne pouvaient se rendre aux toilettes qu'une à deux fois par jour. Richard L. a réussi à s'échapper d'un conteneur après qu'un soldat l'eut frappé avec la crosse de son fusil, lui occasionnant une sérieuse blessure à la tête qui a mis des mois à se cicatriser. Il a raconté à un assistant social qui l'a aidé à soigner sa blessure que deux garçons étaient morts dans le conteneur insuffisamment aéré et que les soldats avaient laissé les deux cadavres sur place pendant des jours.204 Justin K., quatorze ans, qui a passé un mois dans les conteneurs, a indiqué à Human Rights Watch que les soldats faisaient sortir les enfants tous les jours pour les frapper avec des batons.205 Un officier de police a demandé à Francis R. de sortir du conteneur pour lui faire sa lessive. Francis R. a obtempéré mais le policier lui a hurlé de rentrer à l'intérieur et il est rentré. Ensuite le policier l'a de nouveau appelé dehors et lui a demandé pourquoi il avait refusé de travailler pour lui. Le policier a alors cogné la tête de Francis R. contre la paroi du conteneur puis l'a jeté à terre. Alors qu'il racontait son histoire plus d'un an plus tard, Francis R. a montré à Human Rights Watch une cicatrice derrière l'oreille héritée de ce tabassage.206

En 2000, les autorités ont changé de tactique. Elles ont regroupé les enfants des rues en plusieurs occasions mais, plutôt que de tenter de les confiner dans des centres de réhabilitation, elles les ont simplement transportés dans leurs communes d'origine. Les autorités de Kigali ont donné consigne aux bourgmestres locaux (qu'on appelle des maires pour le moment) d'encourager les parents à assumer la responsabilité de leurs enfants et de les garder à la maison. Dans une commune de Butare, des parents auraient été frappés d'une amende de 3.000 Francs rwandais pour avoir laissé leur enfant dans la rue : mais la stratégie est discutable dans la mesure où la plupart des familles ne peuvent payer les 500 Francs rwandais d'inscription à l'école.207 En quelques jours, la plupart des enfants avaient regagné Kigali. Certains ont menti, disant aux autorités qu'ils venaient des communes de Gitarama ou de Kigali Rural proches de la capitale afin de pouvoir revenir plus facilement et plus vite à Kigali.208 Trois filles à Kigali ont déclaré qu'elles avaient été raflées à l'aube du 5 janvier 2001. Elles ont passé deux jours au poste de police de Muhima et ont été emmenées à Masaka dans la commune de Kigali rural, leur préfecture d'origine. L'une d'elles a expliqué qu'elles avaient repris le jour même la route de Kigali « pour continuer nos vies.»209 Les enfants qui ont échappé à la rafle conduite par des centaines d'agents des forces de l'ordre ont supplié le gouvernement de leur porter assistance dans la rue plutôt que de les forcer à retrouver d'intenables situations familiales.210

Les responsables dans d'autres villes en province ont suivi l'exemple de Kigali et ont tenté eux aussi de « nettoyer » leurs rues. A la fin juin 2000, la police a regroupé les enfants des rues de Gisenyi. Le personnel de l'UNICEF qui s'est rendu à Gisenyi le jour suivant a vu des enfants qui avaient été salement blessés et étaient toujours couverts de sang.211 Des enfants ont été aussi regroupés à Butare en janvier et juin 2001 et à Kibuye en juin 2001, comme mentionné plus haut. La radio nationale a cité le maire-adjoint de Kigali, Antoine Semukanya, qui confirmait que la ville avait procédé au regroupement des enfants des rues (et des marchands non agréés) le 17 septembre 2001 et qu'en certaines circonstances « les Forces de Défense locale avaient fait usage de la force.» Il a ajouté : « Nous avons certains cas dans lesquels les Forces de Défense locale ont été frappées par les enfants des rues et les petits marchands.»212 Les habitants de Kigali ont fait état d'une autre rafle à la fin décembre 2001, vraisemblablement conduite dans le souci de nettoyer les rues pour les fêtes de Noël.

Plusieurs enfants ont déclaré à Human Rights Watch qu'après avoir été raflés une ou deux fois, ils ne pouvaient plus se montrer insouciants au point de prendre le risque que ceci se répète. Un assistant social a indiqué que les enfants tentaient d'échapper aux rafles en repérant si une opération se préparait - la radio nationale a parfois annoncé ces rafles à l'avance - et allaient alors se mettre à couvert quelques jours, le temps que les choses se calment.213 Un garçon a raconté comment il s'était échappé pendant une garde à vue en 1999. Il avait été raflé le matin sur le marché et avait passé la journée en prison dans la ville. De plus en plus d'enfants étaient amenés à la prison au fur et à mesure que la journée avançait et jusqu'à ce que les autorités arrivent avec de grands camions en fin d'après-midi pour emmener les enfants au stade de Remera. Il a couru pour s'échapper dès qu'il est arrivé là-bas.214 Les enfants sont fiers de la façon dont ils ont réussi à échapper aux rafles ou à s'évader une fois raflés. Lors d'une réunion avec la sous-préfet de Butare en 2000, un garçon s'est levé et lui a dit que regrouper les enfants de force ne servait qu'à leur apprendre à se montrer plus rusés et à leur enseigner comment échapper à l'emprise des autorités.215

« Donner une leçon aux enfants » : la violence en réponse aux petits larcins
Quand des particuliers rapportent des petits larcins survenus au marché ou dans des lieux très fréquentés, les enfants des rues sont souvent les premiers suspects. Les enfants, les assistants sociaux et les procureurs ont tous déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que les membres des Forces de Défense locale recouraient régulièrement à la force pour arrêter les enfants, quand ils recevaient des rapports sur des tentatives de vol, afin d'obtenir des informations, de récupérer les biens volés ou pour dissuader les enfants de voler de nouveau.

Au marché central de Kigali, ceux qui sont accusés de vol sont enfermés dans un cachot à l'intérieur même du marché. Les enfants l'ont baptisé kw'ishuri, « à l'école » en kinyarwanda. Les enfants qui travaillent régulièrement sur le marché ou aux abords assurent qu'ils peuvent se retrouver dans ce cachot jusqu'à une fois par semaine. Garçons et filles y sont enfermés avec des adultes. Ils racontent que les membres des Forces de Défense locale qui les interrogent au kw'ishuri font souvent usage de la force physique. Paul T., dix-sept ans, a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch qu'il avait été jeté dans le kw'ishuri jusqu'à sept fois en un mois. Dedans, les policiers ou les membres des Forces de Défense locale l'insultaient parce qu'il était un enfant des rues et le brutalisaient.

S'il y a des voleurs sur le marché, alors tous les enfants du quartier vont être malheureux. Les policiers attrapent tous les enfants des rues et les jettent dans le kw'ishuri. Si on a de la chance, ils finissent par trouver le vrai voleur. S'ils retrouvent les biens volés, c'est tant mieux et les enfants sont relâchés. Ils font tout leur possible pour trouver le voleur. Ils interrogent les enfants et les accusent d'être des complices.216

Selon lui, le plus souvent, les policiers relâchent les enfants vers 17h00 ou même plus tôt si leur supérieur passe et trouve les enfants dans le cachot.

La police garde ainsi des enfants pour des périodes de quelques jours dans ses postes en ville. Une assistante sociale a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que parfois elle avait dû emmener des enfants de son centre à l'hôpital après qu'ils eurent été détenus au poste de police de Butare, parce qu'ils avaient des os cassés ou d'autres blessures résultant de coups administrés avec un bâton ou une tige de fer.217 Les postes de police et les prisons urbaines ne fournissent que peu, voire pas du tout, à manger à leurs détenus, partant du principe que les familles apportent généralement à manger à leurs proches emprisonnés. A moins que les gardes n'aient pitié d'eux, les enfants des rues en détention peuvent ne rien avoir à manger. Les enfants et les assistants sociaux de Butare se sont plaints que les enfants soient souvent détenus pour deux ou trois jours, parfois même une semaine, sans rien à manger. « Quand la police s'aperçoit que vous êtes prêts à mourir de faim, elle vous relâche » a assuré un assistant social.218

Quand les enfants enrôlés dans des programmes proposés par les centres spécialisés se retrouvent en prison, le personnel de ces centres se rend le plus souvent au poste de police ou au cachot pour intervenir. Des assistants sociaux ont indiqué aux chercheurs de Human Rights Watch que les agents des forces de l'ordre leur permettaient parfois de reprendre les enfants et qu'ils battaient moins les enfants quand ils étaient sous la surveillance de travailleurs sociaux.219 La directrice d'un centre de Butare a déploré que d'autres enfants lui aient reproché, dans les rues, de les avoir laissés en prison.220

Les enfants se sont également plaints de ne pas toujours savoir pourquoi ils avaient été arrêtés. Pascal K., seize ans, qui participait à un programme de formation dans un centre de Butare, par exemple, a été arrêté par des membres des Forces de Défense locale alors qu'il allait regarder un match de football en ville, puis battu et détenu toute la nuit dans le cachot local avant d'être libéré le lendemain. Il était très indigné par l'incident, n'arrivant pas à comprendre qu'ils aient osé l'arrêter alors qu'il avait une permission écrite du centre pour aller au match.221 Un garçon de neuf ans s'est plaint de ce que, alors qu'il marchait avec un groupe de garçons vers la gare des bus à Kigali au début 2000, ils aient été agressés par des membres des Forces de Défense locale, emmenés au poste de police, battus et détenus deux jours. Il a assuré ne pas savoir pourquoi ils avaient été arrêtés.222

Il ne semble pas y avoir une politique claire sur la procédure à suivre par les forces de l'ordre envers les enfants des rues en détention. Il apparaît, à la lumière des témoignages de ces enfants, que l'objectif des responsables du maintien de l'ordre soit de les malmener pour récupérer les biens volés et d'essayer de « leur donner une leçon ». Voici ce qu'un enfant a expliqué :

Nous sommes battus par les forces de sécurité... quand nous sommes attrapés, sur le chemin du cachot et arrivés au cachot. Dans le cachot, nous sommes battus par les autres prisonniers qui nous demandent de l'argent. Pendant l'interrogatoire, nous sommes battus de façon à dire à la police ce que nous avons volé ou qui a volé.223

Les enfants des rues sont rarement amenés dans les prisons centrales du Rwanda, où les suspects criminels sont généralement transférés une fois que la police a établi leurs dossiers. Ils expliquent que les prisons centrales sont pour les vrais criminels, ceux qui ont commis des crimes graves, pas pour les enfants des rues comme eux. Un groupe de huit enfants des rues, à Butare, a assuré que ni eux ni aucun enfant des rues qu'ils connaissent n'a jamais été interrogé par un procureur, rencontré un avocat ou comparu devant un juge.224 Aucun des plus de cent enfants interrogés pour ce rapport n'a déclaré avoir été en contact avec l'appareil judiciaire. Le coordonnateur du Projet Ministère de la justice/UNICEF consacré aux mineurs en délicatesse avec la loi a déclaré à Human Rights Watch que s'occuper des enfants des rues ne relevait pas de son mandat.225

De même, les agents des forces de l'ordre ne suivent pas des consignes claires et prédéterminées quand ils ont affaire à des mineurs de moins de quatorze ans et qui ne sont donc pas considérés comme pénalement responsables au regard du Code Pénal. Le procureur de Butare a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que les enfants de moins de quatorze ans devraient être détenus pendant 48 heures puis relâchés, pour leur donner une bonne leçon.226 Le sous-préfet de Butare chargé des affaires sociales a maintenu pour sa part que les enfants de moins de quatorze ans ne devraient pas être emprisonnés, quelles que soient les circonstances.227 En réalité, les enfants en dessous de quatorze ans sont régulièrement arrêtés et détenus, mais rarement inculpés. Les enfants des rues sont, théoriquement, hors-la-loi puisqu'ils violent la loi nationale contre le vagabondage, mais les autorités poursuivent rarement ce type d'offense. Le maire-adjoint de Kigali a prévenu qu'il encouragerait les procureurs à commencer les poursuites pour vagabondage si les enfants continuaient de revenir dans les rues malgré les rafles.228

Etant donné l'énorme surcharge de travail que les affaires liées au génocide ont imposé au système judiciaire et l'absence totale d'infrastructures de la justice pour mineurs, il n'est peut-être pas réaliste ou approprié d'attendre de l'Etat d'inculper et de juger formellement des enfants accusés de vol. Une représentante d'une organisation humanitaire internationale a d'ailleurs mis en garde contre les possibles effets pervers qu'il y aurait à insister pour que les enfants accusés de petits larcins soient déversés dans le système judiciaire. Ce serait sans doute pire pour un enfant de passer un an ou plus en prison à attendre son procès plutôt que de séjourner quelques jours dans une cellule locale, a-t-elle fait valoir.229 Le directeur d'un centre pour enfants de Butare a exprimé un point de vue similaire.230 Toutefois, tous deux se soucient toujours du fait qu'il reste difficile de veiller sur les enfants arbitrairement détenus ou maltraités pendant leur détention en l'absence de toute procédure officielle à leur encontre.

La violence sexuelle à l'encontre des filles
Bien que moins nombreuses que les garçons, les filles qui vivent dans la rue rencontrent les mêmes problèmes généralement que les garçons et sont en outre l'objet de fréquentes violences sexuelles. Une ONG locale a récemment rapporté que 80 pour-cent des filles vivant dans la rue ont été violées, une autre étude estimant même qu'elles étaient 93 pour cent.231 Une enquête a également montré que les filles qui se retrouvent dans les rues sont généralement plus jeunes que les garçons dans la même situation.232 Les filles sont souvent moins visibles parce qu'elles ne se déplacent pas en bandes comme le font les garçons mais restent seules, ou en petits groupes.

Beaucoup de filles gagnent la rue quand les familles qui les ont recueillies, soit comme enfant placé soit comme domestique, commencent à abuser d'elles.233 Une fille de dix-sept a raconté qu'elle avait perdu son emploi de domestique parce que le frère de son patron l'avait violée et qu'elle s'était retrouvée enceinte. Désemparée et sans savoir où aller, elle a rejoint la rue où elle a été de nouveau violée puis a contracté une maladie vénérienne. Le diagnostic a été porté dans un hôpital public qui lui a prescrit des antibiotiques. Comme elle n'avait pas d'argent pour acheter ses médicaments, elle a juste gardé l'ordonnance dans sa poche. Elle l'a sortie pour la montrer à Human Rights Watch. Elle s'est déclarée inquiète pour la santé de son bébé à naître.234

La plupart des filles arrivent à se trouver un lieu où dormir mais elles doivent rester dans la rue pour y exercer les petits travaux qui leur permettent de gagner de quoi manger. Quand un étranger invite une de ces filles chez lui, il risque d'avoir autre chose en tête que de seulement lui offrir un endroit pour dormir. Un jeune homme a invité deux filles sans domicile à rester chez lui, soi-disant pour leur protection. Une fois qu'elles furent chez lui, il a sorti une machette et les a violées toutes les deux. Elles ont dû ensuite être traitées, toutes deux, pour des maladies vénériennes. Un gardien de nuit a invité quatre filles qui dormaient sur le parvis de l'Eglise Saint-Michel à Kigali à dormir à l'intérieur plutôt que dehors. Elles ont déclaré à Human Rights Watch qu'après les avoir faites entrer, il les avait violées.235

Un assistant social de Butare a évoqué le cas de Christina G. comme celui d'une « enfant du ciel bleu », la fille d'une mère célibataire que sa famille a rejetée. Christina G. était venue vivre à Nyampinga, un centre qui fournit à une cinquantaine de filles sans domicile un lieu pour dormir, les nourrit, les soigne, leur dispense un enseignement et une formation. Christina G. a annoncé un jour à l'assistant social qu'elle était obligée de quitter le centre pour gagner un peu d'argent, sa mère ayant été arrêtée, afin de pouvoir s'occuper du bébé séropositif de celle-ci. Elle se plaint toutefois, aux assistants sociaux qui continuent de lui rendre visite, de devoir mendier pour vivre et d'être fréquemment violée.236

Les adultes qui travaillent avec les enfants de rues ont remarqué que les filles sont moins exposées aux arrestations arbitraires que les garçons. Le directeur du centre Nyampinga l'a expliqué par le fait qu'elles ont tendance à se déplacer seules, au contraire des garçons qui sont souvent en groupes.237 Mais les filles n'en sont pas moins les victimes occasionnelles des arrestations et des rafles. Jessica, 14 ans, a été arrêtée à Butare en avril 2001 et a passé plusieurs jours dans la cellule du poste de police, accusée d'avoir volé de la nourriture pour manger.238 En janvier 2001, les agents des forces de l'ordre ont regroupé de force les filles et les femmes qui mendiaient dans les rues de Butare.239 Les filles et les femmes qui vendent leurs produits dans des paniers à l'extérieur du marché central de Kigali sont souvent exposées au harcèlement des membres des Forces de Défense locale qui les chassent, les frappent et confisquent leur marchandise, faisant respecter la politique de la ville qui vise à supprimer les commerçants non autorisés aux abords du marché. Quand elles sont raflées, les filles doivent parfois passer la nuit dans des cellules qu'elles partagent avec des hommes et des garçons.240

Tant qu'elles vivent dans la rue, les filles sont constamment exposées au risque de violences sexuelles. Helen U. peut raconter pendant des heures les différents viols dont elle a été victime avant d'aller vivre dans une centre de Butare, à l'âge de onze ans. Après avoir été attaquée par plusieurs hommes, elle a rapidement appris qu'ils pouvaient courir plus vite qu'elle et elle s'est finalement abandonnée à son sort. Son visage est marqué de cicatrices, là où des hommes l'ont régulièrement écorchée avec leurs ongles. L'assistant social d'Helen U. a assisté à son entretien avec Human Rights Watch.

Un jour, un homme a violé Helen U. et a lâché un chien sur elle, lui causant des cicatrices indélébiles aux jambes. Elle raconte que des passants, y compris des agents de la loi, sont passés sans intervenir pendant cette attaque. Une autre nuit, deux hommes l'ont violée. Ils ont fui en entendant quelqu'un arriver et elle, qui saignait déjà, s'est cachée dans un buisson. Deux soldats,241 poursuit-elle, l'ont trouvée et l'un d'eux a commencé à la violer de nouveau. A un certain moment, son ventre était tellement gonflé qu'elle a pensé être enceinte. Elle n'avait jamais eu ses règles. Elle a commencé à réclamer de l'aide quand elle s'est trouvée gravement affectée par des maladies vénériennes et pouvait à peine marcher. Elle fréquente maintenant l'école et reçoit régulièrement des traitements médicaux. Helen U. a peur des risques élevés qu'elle encourt de contracter le SIDA.242

Un petit groupe de filles qui dorment sur l'Avenue Paul VI à Kigali, dans le quartier aisé de Kiyovu, se sont plaintes à Human Rights Watch de violences sexuelles répétées. L'une d'elles âgée de quinze ans, Speciose J., a décrit comment un membre des Forces de Défense locale l'avait violée dans le secteur de Gatsata, lui causant douleurs abdominales et maladies vénériennes. Elle dit l'avoir dénoncé au poste de police et qu'il a été brièvement détenu puis relâché. Son amie a dit à Human Rights Watch quant à elle qu'un garde de l'Institut de Sciences et de Technologie de Kigali (Kigali Institute of Science and Technology, KIST), qui selon elle est un soldat gouvernemental, l'avait forcée à avoir des relations sexuelles avec lui et avait sévèrement battu une autre fille qui se refusait à lui.243

Malgré une attention croissante des forces de l'ordre au problème du viol des enfants à travers le pays, la violence contre les filles vivant dans les rues est rarement punie. Dans un cas, l'assistant juridique qui aide les enfants dans les centres dirigés par l'Archidiocèse de Kigali a réclamé des poursuites contre un homme qui avait violé une fillette de la rue. La fille est enceinte de ce violeur. Le juriste n'avait jamais entendu parler d'autres affaires de violence sexuelle à l'encontre des filles vivant dans la rue qui ait été poursuivie par les procureurs, quand Human Rights Watch l'a interrogé à la fin 2000.244

135 (391)Ministère de la jeunesse, de la culture et de la formation professionnelle, conjointement avec l'UNICEF, Analyse de la situation des enfants des rues au Rwanda Kigali, 1998 ; Centre Carrefour, Archidiocèse de Kigali, Qui Suis-Je ?, Kigali, 1999.

136 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 25 avril 2001.

137 Ministère de la jeunesse, de la culture et de la formation professionnelle conjointement avec l'UNICEF, Situation analysis of street children in Rwanda, pp. 5 et 53-55 ; Archidiocèse de Kigali, Qui suis-je ?, p. 48.

138 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 2 août 2000.

139 "Rwanda: Sexual activity among street children in Kigali", Réseau régional d'information intégré des Nations Unies (IRIN), 13 mars 2002.

140 Archidiocèse de Kigali, Qui suis-je ?, pp. 2-3.

141 Id., pp. 4-6 et 58.

142 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 31 août 2000.

143 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 24 août 2000.

144 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 21 juillet 2000.

145 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 15 juin 2001 ; 7 et 14 novembre et 12 décembre 2000.

146 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 26 avril 2001.

147 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

148 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 13 novembre 2000.

149 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

150 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 19 juillet 2000.

151 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 25 avril 2001.

152 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, maire-adjoint, Kigali, 28 juin 2001.

153 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

154 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 14 novembre 2000.

155 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un assistant social, Butare, 25 avril 2001.

156 Entretiens conduits par Human Rights Watch avec le commandant et les témoins de l'incident, Gisenyi, 7 juin et avec des témoins de l'incident, 15 août 2000.

157 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 21 juillet 2000.

158 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 3 juillet 2001.

159 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 17 et 30 août et 14 septembre 2002 et Gitagata, 5 septembre 2002.

160 Département d'Etat américain, « Rwanda », Country Reports on Human Rights Practices 2001, Mars 2002, Section 5.

161 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 288 juin 2001. Pour en savoir davantage sur la décentralisation, voir International Crisis Group,  « Consensual Democracy in Post-Genocide Rwanda : Evaluating the March 2001 Elections », International Crisis Group Africa Report, no 34, 9 octobre 2001.

162 Bulletins d'informations matinal de Radio Rwanda, 6 et 14 juin 2001.

163 Entretien par téléphone avec Human Rights Watch, Kigali, 26 juin 2001.

164 Bulletin matinal d'informations de Radio Rwanda, 2 juin 2001; entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 26 juillet 2001.

165 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 20 et 28 juin 2001.

166 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 28 juin 2001.

167 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 28 juin 2001.

168 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Odette Nyiralirimo, par téléphone, Kigali, 26 juin 2001.

169 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un assistant social, Kigali, 26 juin 2001. Les estimations de l'enfant sur le nombre de Forces de défense locale et d'enfants impliqués pourraient s'avérer supérieures à la réalité.

170 Human Rights Watch a reçu des informations éparses et non confirmées selon lesquelles des recrutements militaires d'enfants ont eu lieu depuis 1997. Un garçon de Butare a indiqué qu'un soldat avait tenté de le convaincre avec d'autres enfants de rejoindre l'armée mais ne les a pas forcés quand il ont refusé. Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000. Depuis 2000, ce type d'informations coïncide à des rafles.

171 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 26 juin 2001.

172 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 28 juin 2001. Les enfants confondent souvent la police, les FDL et les soldats qui sont tous, à leurs yeux, des forces de l'ordre. Il est difficile de savoir s'ils ont été battus par les Forces de défense locale et/ou la police nationale à Muhima.

173 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 28 juin 2001.

174 Entretien conduit par Human Rights Watch Butamwa, 28 juin 2001.

175 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 28 juin 2001.

176 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 28 juin 2001.

177 Entretien par téléphone avec Human Rights Watch, Kigali, 28 juin 2001.

178 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 28 juin 2001.

179 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 24, 25 et 26 juin 2001.

180 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 28 juin 2001.

181 Entretien conduit par Human Rights Watch par téléphone, Kigali, 14 novembre 2001.

182 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 20, 26, 28 et 31 juin, 6 juillet 2001.

183 Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec le Dr. Odette Nyiralirimo, 26 juin 2001.

184 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gitarama, 25 juillet 2001.

185 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 25 juillet 2001.

186 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 1er et 6 juillet 2001. Comme signalé plus haut, de nombreux enfants des rues n'ont pas obtenu leurs cartes d'identité.

187 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 7 juillet et 3 octobre 2001.

188 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 28 juin 2001.

189 Notes de terrain, Human Rights Watch, 28 juin 2001.

190 Art. 37(b).

191 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 31 juillet 2001.

192 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 28 juin 2001 et 15 août 2001.

193 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 7 novembre 2000.

194 Art. 37(b).

195 Women's Commission for Refugee Women and Children, Rwanda's Women and Children, p. 34.

196 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

197 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

198 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 19 juillet 2000.

199 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un assistant social, Butare, 19 octobre 2000.

200 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 24 juillet 2000.

201 Entretien par téléphone avec Human Rights Watch, Kigali, 26 juin 2001.

202 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 19 avril 2000.

203 A la fin 1999, les gendarmes ont été officiellement démobilisés et incorporés dans la police nationale.

204 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un assistant social, Butare, 19 octobre 2000.

205 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 19 septembre 2000.

206 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

207 Entretiens conduits par Human Rights Watch avec des assistants sociaux, Butare, 19 et 20 octobre 2000.

208 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 septembre 2000.

209 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 21 février 2001.

210 « Une rafle de mayibobo dans les rues de Kigali », Imvaho Nshya, no.1369, 1er-10 janvier 2001; Innocent Karekezi, « Les enfants des rues, un délicat problème », Imvaho Nshya, no.1372, 22-28 janvier 2001.

211 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 18 juillet 2000.

212 « Rwanda : Hawkers, Street children evicted from Kigali to curb insecurity », BBC Monitoring - Source : Agence de Presse RNA, Kigali, en anglais le 17 septembre 2001.

213 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 17 novembre 2000.

214 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

215 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

216 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 16 novembre 2000.

217 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

218 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000 ; Kigali, 23 avril 2001.

219 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 24 avril 2001 et 19 octobre 2000.

220 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

221 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare 19 octobre 2000.

222 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butamwa, 2 août 2000.

223 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

224 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 19 octobre 2000.

225 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Jean-Louis Ndahirwa, Kigali, 16 novembre 2000.

226 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Jules Marius Ntete, Butare, 25 avril 2001.

227 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Ancille Kagabo, Butare, 25 avril 2001.

228 Entretien conduit par Human Rights Watch avec Antoine Semukanya, Kigali, 28 juin 2001. Le vagabondage est interdit par la loi rwandaise, même si ce délit est rarement poursuivi. Human Rights Watch s'inquiète de ce que les lois sur le vagabondage puissent mener à des arrestations arbitraires et sont, en elles-mêmes, contraires à la liberté de mouvement garantie par les lois internationales de protection des droits humains.

229 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 12 décembre 2000.

230 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 24 avril 2001.

231 « Près de 80 % des "filles de la rue" violées », Agence France Presse, 26 février 2002 : « Sexual activity... », IRIN.

232 Archidiocèse de Kigali, Qui suis-je ?, p. 3.

233 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 20 octobre 2000.

234 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 21 février 2001.

235 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 21 février 2001.

236 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 20 octobre 2000.

237 Entretien conduit par Human Rights Watch, Butare, 20 octobre 2000.

238 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un assistant social, Butare, 24 avril 2001.

239 Notes de terrain, Human Rights Watch, Butare, 8 janvier 2001. Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 24 avril 2001.

240 Les médias locaux rapportent régulièrement des rafles de marchands sans autorisation; voir aussi le bulletin d'informations de Radio Rwanda du 17 septembre 2001.

241 Elle a employé le mot «soldat » mais peut avoir voulu signifier policier ou membre des Forces de Défense locale.

242 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Butare, 20 octobre 2000 et 11 janvier 2001.

243 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Kigali, 21 février 2001.

244 Entretien conduit par Human Rights Watch avec un juriste, Kigali, 17 novembre 2001.

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